SPRING BREAKERS

Afin de pouvoir participer aux orgies du Spring Break*, quatre filles à court d’argent décident de braquer un snack.
La fête bat son plein jusqu’à ce qu’elles soient arrêtées pour consommation
d’alcool et de drogues. C’est à ce moment-là que leur route croise celle
d’Alien (James Franco), un rappeur-gangster, qui paye leur caution afin
qu’elles puissent sortir de prison…

En faisant appel à Selena Gomez et Vanessa Hudgens,
égéries de la Disney Channel, et en utilisant pour cadre le Spring Break, on pourrait s’attendre avec Spring Breakers à un simple film de divertissement. D’autant
plus qu’Harmony Korine (réalisateur de Gummo , 1997, et
scénariste de Ken Park , 2002) s’est quelque peu
joué du spectateur avec un trailer accrocheur digne d’un teen-movie
ultra-violent.

Mais dès le premier quart d’heure, ces couleurs et
musiques attrayantes prennent bien vite une tournure moins édulcorée, et l’on
constate vite que le film d’Harmony Korine est porteur d’une véritable
réflexion sur la jeunesse américaine, sa superficialité et sa logique de
(sur)consommation. Il ne s’agit pas pour le réalisateur de montrer les excès
des fêtes estudiantines, mais de se focaliser sur le vide dans lequel ces
jeunes circulent. Un vide créé par l’absence de réflexion, de repères et de
valeurs. Au travers de mouvements de caméra circulaires, d’un montage répétitif
et d’images répétées (jusqu’à cinq à six fois !) voire de phrases
répétées, Harmony Korine parvient à nous montrer que ces jeunes ne font en
réalité rien d’autre que de tourner en rond. Vivant dans un monde où règne la
surconsommation (où l’on brûle les voitures comme on collectionne les
casquettes), les quatre filles semblent évoluer dans un monde qui leur échappe.

En réalité, elles seules sont maîtresses de ce qui leur arrive. Pour preuve,
les personnalités masculines du film (James Franco et Gucci Mane) semblent
quasiment inoffensives par rapport à la détermination de ces quatre filles.
D’emblée, elles sont présentées comme les héroïnes d’un jeu vidéo où elles ont
tout pouvoir. Dans cette logique, il ne semble dès lors pas anodin non plus
qu’Harmony Korine ait recours aux images vidéo (façon clip MTV), que les jeunes ont tendance à (sur)consommer sans jamais
vraiment y réfléchir. Korine dépeint le vide au travers d’images sursaturées et
se sert ainsi des armes qu’il vise à dénoncer…

Astucieux ou non, qu’on n’adhère ou qu’on n’adhère pas,
une chose est sûre, ce film ne peut donner qu’à réfléchir…

Astrid De Munter

* Le " Spring Break ", appelé en français « semaine de relâche »
ou « pause du printemps » est un congé d’une ou deux semaines au
début du printemps durant lequel beaucoup d’étudiants américains partent à
Cancun ou en Floride pour faire la fête.