Road movie
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BURT MUNRO, THE WORLD’S FASTEST INDIAN

Roger Donaldson (USA/Nouvelle Zélande 2005 - distributeur : Belga Films) rapprochement avec "Man Push Cart" de Ramin Bahrani

Anthony Hopkins

127 min.
10 mai 2006
BURT MUNRO, THE WORLD'S FASTEST INDIAN

L’un des plaisirs offerts par le 7ème art est de tisser des liens entre des films, a priori très différents, mais qui présentent une même thématique déclinée autrement.

Ainsi, à mes yeux, il existe un rapport entre Burt Munro ( formidable Anthony Hopkins), un septuagénaire néo-zélandais qui bricole inlassablement une moto aussi vieille que lui et Ahmad (poignant Ahmad Razvi), un immigrant pakistanais qui vit à New York une vie difficile et désespérément répétitive.

Ce qui les unit, au-delà de ce qui les distingue, c’est un désir.
Le désir, pour l’un de battre sur le grand lac salé de Bonneville dans l’Utah le record du monde de vitesse, pour l’autre de s’acculturer dans un environnement dont il va mesurer les aspérités égoïstes, racistes et malveillantes.

Ce désir est soutenu, par Donaldson, par une mise en scène classique, exploitant avec savoir faire mais sans originalité les lois du genre. Ainsi les épreuves jalonnant le parcours de Burt, pour être surmontées,lui demanderont de développer les vertus cardinales prisées par les anglo-saxons : persévérance, ingéniosité, confiance, humour et sens de la solidarité.
Pour Bahrani ce désir est traité avec un minimum de concession esthétisante ou d’artifice sursignifiant.

Ahmad est filmé au plus près de son désespoir urbain par une caméra respectueuse de son errance solitaire, Burt est suivi par une caméra qui magnifie chacune des étapes de son parcours essentiellement vécu dans les grands espaces américains et ponctué de rencontres altruistes et généreuses.

Pour l’un, le rêve - le surfait « American Dream » qui sert d’appeau à tant de projets d’immigration - va devenir mirage, pour l’autre il deviendra réalité, confortant ainsi, une fois de plus, ce mythe si tenace de la « success story » présenté sans son verso c’est-à-dire sa face miroir aux alouettes.

Bahrani, proche d’un cinéma néo-réaliste (« Le Voleur de Bicyclette ») ou naturaliste porte sur la vie un regard sombre. Sa philosophie est proche de celle de Camus (« Le mythe de Sisyphe » amputé de sa fin : « il faut imaginer Sisyphe heureux ») ; Donaldson représente un cinéma naïf, qui choisit de couper court à la notion d’échec qui pourtant sous-tend (et quelque part humanise) toute velléité d’action.

Le désir réalisé de Burt en fait un héros local, le désir d’Ahmad, parce qu’il débouche sur une désillusion, lui confère une dignité qui suscite une autre forme de respect et de sympathie (m.c.a)