LES PETITS MOUCHOIRS

C’est un formidable hymne à la vie, à l’amour avec un grand A, au partage humain que nous offre Guillaume Canet dans son troisième film en tant que réalisateur après « Mon Idole » en 2002 et « Ne le dis à personne » en 2006. Après quatre nouvelles années passées devant la caméra, donnant corps à des personnages aussi diversifiés qu’intéressants, le réalisateur livre son projet le plus personnel jusqu’à ce jour, un film « de potes » simple sur la vie, où chacun pourra trouver le miroir de ses émotions et de ses démons, travers insupportables à vivre et parfois, à supporter, qui peuvent, pour un observateur extérieur, receler d’une incroyable drôlerie.

Le cas de Max (François Cluzet, grand tout simplement) en est l’exemple le plus parlant : hôtelier ayant une vie professionnelle pleine de succès, il part chaque année avec sa femme, Véro, et invite ses amis dans une grande maison du Cap Ferret.

Autour de Max gravitent ses amis de longue date, notamment Marie (Marion Cotillard), en fuite d’elle-même, à la fois indépendante et si vulnérable ; Vincent (Benoît Magimel), qui vit une période où son identité se trouve fragilisée et Eric (Gilles Lellouche) qui ouvre les yeux, ne serait-ce que par bribes, sur ses propres faiblesses. Ce sont non seulement les secrets de chacun, les parts sombres, les angoisses, les fuites en avant, en arrière, qui se révèlent, mais aussi, les prises de conscience, les actes courageux, les levées de voile sur soi-même.

Guillaume Canet réunit, pour incarner chaque visage de cette comédie humaine douce amère, une troupe fidèle d’artistes. Les liens réels des amis à la ville ne font que renforcer la force de leur interprétation. Et le tournage, effectué la plupart du temps à deux caméras, a permis à cette belle équipe de laisser libre cours à une liberté et à une spontanéité des plus agréables.

La maîtrise de Guillaume Canet derrière la caméra ne fait pas de doute (la remarquable première séquence est d’ailleurs anthologique), il sait prendre le temps d’installer la scène, le personnage, de le laisser prendre vie à l’écran. Parfois un peu longuet, il propose un film jalonné de quelques temps faibles. Pourtant, c’est aussi dans les creux installés par ces scènes que se glissent les grandes vérités que le cinéaste parvient à capter, ses comédiens à faire surgir, au coin d’un regard, d’un geste, du temps qui s’écoule.

Empli de vie, ce film l’est à l’extrême. Passionnel aussi. Et très touchant. Il livre tel un témoignage le partage d’une manière d’appréhender le monde. Alors, vous non plus, n’oubliez pas vos petits mouchoirs pour recevoir cette très belle et grande œuvre d’une sincérité bouleversante.

(Ariane Jauniaux)