Docu-reportage
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Coup de coeurFOLLOWING SEAN

Ralph Arlyck (USA 2004 - distributeur : Imagine Film Distribution)

Ralph Arlyck, Sean Farrell

88 min.
28 juin 2006
FOLLOWING SEAN

A quoi tient la grâce d’un film ?
Dans le cas de « Following Sean » c’est certainement à une écriture subtile qui touche au plus près l’intime des existences humaines.

En 1969, Ralph Arlyck étudie le cinéma à San Francisco.
Il décide de consacrer un court métrage à Sean, l’enfant de ses voisins hippies, qui, à quatre ans, affirme fumer de l’herbe, aimer courir pieds nus et détester la police.

25 ans plus tard, Arlyck part à la recherche de Sean. Qu’est-il devenu ?

Un électricien syndiqué, qui après des études en sciences politiques, se préfère solidaire de la classe ouvrière. Renouant ainsi avec le militantisme communiste de sa grand-mère dont la rectitude sectaire avait incité ses parents à vivre l’idéal libertaire des années "beatnik"

Et c’est là que réside l’intérêt du film, dans ce nouage de générations qui incite chacune de celles-ci à prendre le relais, dans l’alliance ou le contre-pied, de celle de ses aînés.

Ce cheminement transgénérationnel, rendu à la fois par des rencontres et des images contemporaines mêlées à d’autres appartenant au passé, induit le réalisateur à se plonger dans sa propre vie et à en tirer de mélancoliques déductions sur une Amérique, qui au cours des trente cinq années passées, à force d’avoir composé avec une réalité politique et sociale axée sur le profit et l’individualisme en a oublié ses idéaux de liberté et de solidarité.

Un peu comme Michael Apted l’a fait dans son travail de documentariste consistant à filmer tous les 7 ans un groupe d’enfants, Arlyck est intéressé par la notion de continuum.
Son dernier plan, avec une sincérité qui ne doit rien à un dispositif de stratégie cinématographique mais à un authentique souci du « que va devenir l’autre ? », suscite chez le spectateur une fraternelle envie de savoir quel sera l’avenir du petit Alex, le fils que Sean a eu de son mariage avec une immigrée russe, et qui ressemble tellement à ce qu’il était lui-même en 1969.

Avec un peu de chance rendez-vous nous est donné pour 2030. Arlyck n’aura à ce moment là que 80 ans, l’âge auquel Kurosawa a réalisé « Ran » et peut-être qu’il pourra clore son hypothétique trilogie par une note moins poignante que celle de « Following Sean » qui rappelle combien la fugacité des choses qui passent et se transforment peut nous laisser désemparés face à un monde dans lequel on ne se reconnaît plus. (m.c.a)