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DU VENT DANS MES MOLLETS

Carine Tardieu (France 2012)

Agnès Jaoui, Judith Magre, Isabella Rosselini, Isabelle Carré, Juliette Gombert

89 min.
22 août 2012
DU VENT DANS MES MOLLETS

Du vent dans les mollets, des non-dits et autant de questions dans la tête, du bonheur et des chagrins en bandoulière, c’est avec une joyeuse gravité que Carine Tardieu adapte pour le grand écran le roman et la bande dessinée de Raphaële Moussafir édités respectivement en 2006 et 2009.

Est-ce ce sentiment d’une connivence - mot plus adéquat que celui de collaboration par l’intimité mystérieuse et instinctuelle qui semble la nourrir – ressentie dès les premières images par le spectateur entre les univers d’une cinéaste et d’une plumitive qui colore le film d’une aura sympathique. Arc-en-cielisée.

Que ni les clichés ( ils sont nombreux), ni les prévisibilités (elles s’épinglent avec l’évidence des raies sur le dos d’un zèbre) ni un incessant babil (à côté duquel celui de Zazie semble appartenir au Monde des mutiques) n’arrivent à écorner.

Il y a de la joie, de la fantaisie, de la légèreté et de la profondeur, de la souffrance et du plaisir dans cette histoire d’amitié entre deux fillettes.

Dont l’une par sa facétieuse intrépidité va libérer l’autre de ses angoisses face aux douleurs tues d’un père rescapé de la Shoah et de ses relations complexes avec une mère aussi aimante que castratrice.

Carine Tardieu dessine, avec une esthétique dont l’artificialité est sauvée de justesse par le jeu épatant et revigorant d’acteurs qui croient en leurs personnages, le portrait d’une famille de la classe moyenne française au début des années Mitterrand.

Donnant à voir, à ceux qui les ont vécues, une réalité équilibrée entre nostalgie, tendresse et acuité mais donnant aussi à la notion de fantasme son poids ravageur. Excessif et potentiellement destructeur.

Car si la mère voit en la poupée Barbie (*) qu’elle refuse à sa fille un suppôt de dévergondage, le père verra dans la maman de l’amie de sa gamine, archétype de la jeune célibataire libérée, la possibilité de sortir de la chape de frustration créée par une épouse qui a décidé de purger les souffrances du passé en refusant d’investir le présent d’une libido salvatrice.

Cette ambiguïté, par sa récurrence, conforte les personnages, grands ou petits, dans leur impression de ne pas être aimés comme ils le souhaiteraient.

Rappelant ainsi, sourire aux lèvres mis aussi larmes aux yeux, combien la vie au quotidien peut être désarmante lorsque le chemin vers la mise à plat des malentendus n’est pas abordé avec franchise et courage. (mca)

(*) signifiant ( Klaus Barbie) qui dans le contexte sous-jacent à la narration, à savoir l’impact de l’extermination des Juifs sur la génération issue de celle qui a souffert dans sa chair et dans les camps, peut toucher à d’autres souffrances que celles de ces « poupées fabriquées en Chine par des enfants orphelins et victimes de la mondialisation ».