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LA VIE D’ADELE

Abdellatif Kechiche

Léa Seydoux, Adèle Exarchopoulos, Jérémie Laheurte, Catherine Salée, Aurélien Recoing

175 min.
10 octobre 2013
LA VIE D'ADELE

Le réalisme d’Abdellatif

 

Récompensé de la Palme d’Or pour son quatrième long-métrage, le réalisateur franco-tunisien, Abdellatif Kechiche s’est librement inspiré de la bande dessinée Le Bleu est une Couleur Chaude* pour filmer les moments forts d’un premier d’amour dans La vie d’Adèle : chapitre 1 et 2.

Au-delà des polémiques, qui ont au moins le mérite de placer le cinéaste dans la famille des grands réalisateurs tyranniques, le résultat est là : un film étonnant, relevant d’une écriture cinématographique spéciale et d’un choix de mise en forme épurée, où règne le gros plan sur le visage d’Adèle pour ne laisser s’échapper que les émotions.

Déjà son œuvre cueillait avec force naturaliste des tranches de vie, abordant des thèmes tels que les différences sociales et la transmission, réussissant avec génie, dans la lignée du cinéma vérité, à faire surgir la vie à l’écran. 

Dans La vie d’Adèle : chapitre 1 et 2 , le spectateur plonge réellement dans le trouble qui envahit Adèle, lorsque, adolescente, elle se sent attirée par Emma, une jeune artiste aux cheveux bleus. Sur plusieurs années, le film suit l’évolution d’Adèle, de sa première relation amoureuse à son premier emploi en tant qu’institutrice.

Abdellatif Kechiche épate, car il parvient à accrocher le spectateur trois heures durant, fasciné autant que dérouté par ce gros plan hypnotisant, qui semble le happer dans l’intimité de la jeune fille. Au risque de lasser, le rythme lent permet au contraire de prendre le temps de faire connaissance avec Adèle et de s’attacher à elle, à travers le ressenti de ses petits gestes quotidiens ou encore du son de sa respiration.

La jeune comédienne Adèle Exarchopoulos porte réellement le film, se livrant avec sincérité dans tous ses états. Léa Seydoux épouse elle aussi avec superbe son rôle de « tomboy ».

Quelques réserves, très minimes, alourdissent un peu le film et lui font perdre de son réalisme. Ainsi, certaines attitudes prêtées aux personnages venant de milieux sociaux différents semblent parfois stéréotypées. Il y a aussi les scènes d’amour en « taille réelle » où le gros plan laisse la place à un plan plus large ce qui provoque un effet esthétisant un tantinet racoleur, renvoyant certes à l’art ancien, ses tableaux et ses statues représentant la jouissance de la femme, ou, comme le soulèvent deux personnages, serait-ce plutôt celle fantasmée par les hommes ? Enfin, le passage dans le temps n’est pas ressenti à sa juste valeur, ce qui engendre également un certain détachement.

Malgré tout, il s’agit d’un film impressionnant, à voir certainement … de préférence non au premier rang pour l’apprécier pleinement !

 

(Luz)

 

* Le Bleu est une Couleur Chaude de Julie Maroh, publiée par Glénat en 2010.