Docu-reportage
2étoile(s) 2étoile(s) 2étoile(s) 2étoile(s) 2étoile(s)

PORK & MILK

Valérie Mréjen (France 2004 - distribution : Ecran Total)

lire aux éditions Allia le journal de bord tenu par la réalisatrice

52 min.
5 juillet 2006
PORK & MILK

L’intérêt de ce film est d’être un documentaire.
Sa beauté est d’avoir été cadré et monté par une plasticienne vidéaste.

Valérie Mrejen, en 2002, est contactée par une galerie de Tel-Aviv qui souhaite exposer ses travaux.
Dès son premier contact avec Israël elle est intriguée par les Meharims, ces juifs orthodoxes ultra religieux qui portent papillotes, sont habillés en noir et vivent asservis aux prescriptions alimentaires du « Cacherout » qui interdit notamment de mélanger viande et produits laitiers.

Elle leur consacre une vidéo « Dieu » qui fait maintenant partie de la collection d’art moderne de Beaubourg.

Souhaitant prolonger et approfondir son travail, elle se rend à Tel-Aviv pour y interviewer des
hommes et des femmes qui ont cessé de pratiquer et sont devenus des laïcs.

La force de Mréjen est dans l’écoute de ces paroles, supportées par des images simples (sur des visages, des mains, des corps) qui cernent, avec retenue, la tristesse d’un discours habité par la violence de pratiques communautaires étouffantes.

Le bonheur n’est pas au rendez-vous de l’abjuration. Comme dans « The Outlaw Josey Wales » où Clint Eastwood doit se reconstituer une personnalité et des relations pour faire face au vide laissé par une famille qu’il a perdue, Eliyahu, Michal et les autres devront apprendre à naître à eux-mêmes.

Ce qui n’est pas chose facile quand on a vécu confiné dans des familles oppressives sans doute mais néanmoins soudées par des rituels, des prières et des fêtes.
Cette nostalgie, cette tristesse, Mréjen les capte respectueusement sans vouloir leur donner un sens.

Film qui témoigne et qui émeut. Qui questionne et fait se souvenir que certaines des anecdotes
racontées ne sont pas très éloignées de ce qu’ont été les prescriptions de la religion catholique. 
Ainsi la nécessité imposée par les Kibboutz ultra conservateurs d’occulter les scènes de nus cinématographiques fait écho au « Cinéma Paradiso » de Tornatore et à ses baisers coupés pour éviter les foudres de la censure catholique.

Trop diluées les prescriptions sociales égarent l’individu, trop structurées elles l’écrasent.
Où est le juste milieu, celui du rapport harmonieux entre l’individu et le monde qui l’entoure ?
A mi-point de la décontraction de « Coffee & Cigarettes » de Jarmusch et de l’excès d’ordonnancement de « Pork & Milk » ? (m.c.a)