Comédie politique
2étoile(s) 2étoile(s) 2étoile(s) 2étoile(s) 2étoile(s)

KILOMETRE ZERO

Hiner Saleem (France/Irak/ 2005 - distributeur : Victory Films)

Nazmi Kirik, Eyam Ekrem

91 min.
11 août 2006
KILOMETRE ZERO

Comment peut-on être Persan se demandait Montesquieu au début du XVIIIe siècle ?
Aujourd’hui la même question pourrait se poser à propos des Kurdes qui se voient tiraillés, à défaut de patrie, entre 5 nationalités dont aucune n’est synonyme de paix politique.

Dans « Kilomètre zéro » les Kurdes sont Irakiens et enrôlés de force dans une armée engagée durant l’hiver 1988 dans un conflit contre l’Iran.

Ako, le personnage principal, est affecté à une mission spéciale : ramener, en compagnie d’un chauffeur arabe, le corps d’un martyr de guerre dans son village natal.

Commence pour les 2 compères une épreuve obligée de compagnonnage au cours de laquelle ils vont tantôt s’affronter, tantôt s’unir pour affronter ensemble la même adversité.

Embarqués dans la même galère, comme l’étaient les compagnons de route dans « Un Taxi Pour Tobrouk » de Denys de la Patellière, ils vont découvrir l’absurdité des formalités de contrôle, les ravages de la guerre laissant les villages déserts et leurs habitants mutilés.

Cette virée répartie entre tragédie et comédie (ce mélange qui conférait à « No man’s land » de Danis Tanovic son ambiance saugrenue) les conduit, à travers des paysages magnifiquement austères vers un point de rupture d’autant plus pathétique qu’il intervient après le seul moment de communion entre les 2 hommes en contemplation devant la beauté des montagnes du Kurdistan.

« Kilomètre zéro » n’est pas un road movie qui débouche sur une connaissance plus étendue de soi ou de l’autre comme dans « The Three Burials » de Tommy Lee Jones mais un voyage sombre et poignant.
Un voyage impasse qui ne permettra pas à ceux qui l’entreprennent de trouver un terrain d’entente mais qui renforcera Ako dans son désir de quitter à tout jamais cette région mortifère dans laquelle brimades, accusations (d’être les suppôts du sionisme et de l’impérialisme) et exécutions sommaires sont réservées à ceux de son peuple.

Si quelques scènes inspirés d’autres productions soit de Saleem (le lit toboggan de « Vodka Lemon ») soit d’autres cinéastes (la statue de Saddam qui se déplace en camion fait penser à celle de Lénine dans « Good Bye Lenin » de W. Becker) donnent au film une impression de déjà vu, ces répétitions formelles ne l’empêchent pas d’être un intéressant témoignage contre les ignomies de la guerre et de la dictature. (m.c.a)