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FAST FOOD NATION

Richard Linklater (GB/Inde 2006 - distributeur : Cinéart)

Catalina Sandino Moreno, Ethan Hawke, Greg Kinnear, Ashley Johnson

114 min.
30 mai 2007
FAST FOOD NATION

Dans la prière bien connue de notre monde occidental, « Le Notre Père », il est demandé à Dieu de nous donner notre pain quotidien.

Dans les documentaires (*) sortis sur nos écrans ces derniers mois, il nous est proposé de réfléchir au prix que nous sommes prêts à payer pour assurer la qualité du contenu de nos assiettes.

Dans « Fast food nation », Richard Linklater s’est penché sur les coulisses, qu’il visite en bottes d’égoutier, de la plus importante industrie américaine - le hamburger - loin devant le pétrole.

Tiré d’un best-seller d’Eric Schlosser (**), « Fast food… » est un film hybride. Tantôt il passionne par son approche responsable d’une forme de régression qui assaille le fonctionnement de la société américaine, tantôt il ennuie parce qu’il est, transposé à une échelle fictionnelle, une répétition de ce qu’on savait déjà sur cette épizootie, plus endémique que la tremblante du mouton, qui pousse à tayloriser le commerce des aliments en vue d’en optimiser le profit.

« Fast food… » raconte une histoire simple dans laquelle déboulent un nombre impressionnant de stars qui apportent à la valeur dénonciatrice du propos leur conviction personnelle et engagée.

Suite aux résultats d’une analyse selon laquelle il y a de la m… dans les viandes proposées à ses clients, le PDG d’une chaîne de restauration rapide envoie le responsable du marketing investiguer sur les lieux d’abattage des animaux.

Occasion, par des scènes visuellement marquantes, de dénoncer le cynisme des industriels et des intermédiaires commerciaux (un impudent Bruce Willis), de cibler la mise au point d’un système qui aromatise artificiellement les aliments, et d’évoquer la marginalisation des éleveurs de bétail qui tentent de résister à l’opprobre de la loi du profit à tout prix (un Kris Kristofferson excellent en résistant désabusé).

« Fast food… » a le mérite de faire réfléchir sur la mise en place d’un monde dérangeant et inquiétant qui dénie, aux animaux et aux hommes, respect et dignité. Les uns parce que leur normalisation s’accompagne d’une incapacité de vivre en dehors de leurs périmètres barbelés, les autres parce que leur exploitation forcenée et illégale les contraigne à vivre dans des conditions de misère aliénantes.

Le constat est consternant. La société moderne est en train de pourrir sous le regard inconscient, non informé ou indifférent de la plupart d’entre nous. Fonçant comme un train fou dans un enténèbrement constant, il semble qu’il n’y a plus de pilote pour arrêter cette course vers des bénéfices dont la monstruosité se nourrit de désespoir, d’humiliation et de… polyphosphates. (m.c.a)

(*) « Our daily bread » de Nikolaus Geyrhalter ; « El Ejido » de Jawad Rhalid, « We feed the world » d’Erwin Wagenhofer, « Super size me » de Morgan Spurlock.
(**) journaliste qui a, pendant des années, enquêté sur la face cachée de l’industrie alimentaire américaine. Pour la petite anecdote « people », il est le beau fils de Robert Redford.