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SLEEPING DOGS LIE ou JUSTE UNE FOIS

Bob Goldthwait (USA 2006 - distributeur : Paradiso Filmed Entertainment)

Melinda Page Hamilton, Bryce Johnson

89 min.
5 septembre 2007
SLEEPING DOGS LIE ou JUSTE UNE FOIS

Un point commun entre le cultissime Carlos Reygadas et le potache Bob Goldthwait ?
Une fellation en prologue narratif. Montrée dans toute son amplitude verticale dans « Batalla en el cielo » et racontée en voix off dans « Sleeping… ».

Cette « mise en bouche » est, dans les deux cas, autant une transgression qu’un défi. Une envie de secouer le cocotier d’une bienséance idéologique. Un besoin d’interroger nos rapports à la sexualité, aux normes sociétales et à la vérité .

Amy est une jeune femme dont l’apparence lisse et blonde (à la Gwyneth Paltrow) cache d’inattendues fêlures. Au cours du jeu dangereux de secrets à révéler, elle confie à son fiancé qu’un soir, il y a longtemps, elle a eu avec son chien une relation dont l’extravagance aurait mis en joie les adolescents d’ « American pie ».

Mais l’amoureux n’a plus l’âge d’entendre toutes les hardiesses. Corseté par un politically correct coupe-jarret de toute tolérance, il est incapable d’ingérer l’aveu et de l’accepter pour ce qu’il est : une exceptionnelle occurrence.

« Sleeping… », même s’il a des allures de comédie, n’est pas une comédie. Mais un miroir tendu
à nos peurs, à nos infirmités relationnelles et à nos égoïsmes de pensées qui ne sont prêtes qu’à
admettre ce qui les arrange ou les émoustille. A ce sujet, le fantasme de lesbianisme supposée chez l’aimée a toujours, chez le mâle standard, la cote comme activateur de testostérone… et l’aveu d’un avortement apparait plus convenable qu’un moment d’égarement quatrupèdiforme.

Aidé d’une caméra joyeuse et féroce, Bob Goldthwait interroge l’impératif du « tout dire » qui a saisi, avec la force d’un onzième commandement, la société américaine depuis l’affaire Clinton.

Pep et détonnant, « Sleeping… » interpelle parce qu’il est servi par de bons acteurs, une excellente actrice (Melinda Page Hamilton) et d’intéressants dialogues. Son histoire, déjantée dans son postulat et logique dans sa narration, réussit la gageure de transformer le mauvais goût en réflexion de qualité.

Quand le vulgaire devient satirique, il acquiert une maturité. Celle que le silence convient mieux, à certaines circonstances, que la sincérité. "The secret beyond the door" titrait un des meilleurs films de Fritz Lang. Qu’il y reste (*) forever ajouterait, aujourd’hui, Goldthwait.

"Sleeping..." a reçu le prix du Jury lors du festival de Sundance 2006 (m.c.a)

(*) Le titre originel de "Sleeping..." était ... "Stay" !

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