Conte philosophique
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LE QUATTRO VOLTE

Michelangelo Frammartino (Italie 2010)

la Calabre, des montagnes, un berger, un chevreau et des arbres

88 min.
19 janvier 2011
LE QUATTRO VOLTE

Si ce qui est rare est précieux, alors « Le quattro volte » est un film précieux.

Inclassable par son parti pris de se situer hors de toute narration.

Poétique par son intention de saisir en toute chose la beauté.

Exigeant (*) par son refus de recourir à la parole pour donner corps à un voyage au coeur des 4 règnes (l’humain, l’animal, le végétal et le minéral) qui donnent au Monde non pas sa hiérarchie mais sa complémentarité.

Enchanteur par sa capacité à scruter dans l’insignifiant et l’anodin ce qui fait la grandeur de la vie sur terre.

Majestueux par son écoute attentive des bruits et sons naturels . 

Généreux par son intérêt renouvelé pour les gens simples dont la vie, scandée par des rituels immuables, rappelle les personnages attachants du premier film du réalisateur « Il dono ».

Magique parce qu’il envoûte et hypnotise celui qui le regarde avec des yeux décillés. Conscients que l’invisible est le soutènement mystérieux qui enrichit le sensible.

Audacieux (chamanique ?) par son pari pascalien de tabler sur l’existence des esprits (le shintoïsme parle de Kami) qui habitant chaque chose leur confère grâce et magie.

Lumineux et contemplatif par la douceur d’une caméra qui se pose avec amour sur une Calabre montagneuse et ses habitants à 4 ou 2 pattes.

Paisible et confiant parce que les existences ne connaissent pas de fin. Elles se transforment simplement, aisément en une énergie d’une autre essence.

A la mort d’un vieux berger répond la naissance d’un chevreau. Qui à tour ira se coucher au pied d’un arbre. Lequel quand le moment viendra sera promis à la hache. Avant de terminer en rondins empilés et consumés sous une meule de foin pour devenir charbon.

Dont la fumée sera promise au ciel.

Comme si elle était une partie du grand Tout.

Une parcelle d’âme collective.

 

"Le quattro..." a remporté le Grand Prix du festival du cinéma italien d’Annecy de 2010. (mca)

(*) sans avoir le hiératisme des films (on pense notamment à "Sicilia !") de Jean-Marie Straub et Danièle Huillet