Joaquin Phoenix, Philip Seymour Hoffman, Amy Adams, Laura Dern ,…
The Master nous conte la rencontre fortuite entre deux personnages atypiques et perturbés. D’un côté, Freddie (Joaquin Phoenix), ancien marin qui distille son propre alcool et ne parvient pas à contenir la violence ni la perversité qui l’animent. De l’autre, Lancaster Dodd (Philip Seymour Hoffman), « le maître », personnage charismatique et guide spirituel d’un groupe de fanatiques qui se nomment « La Cause » et dont le mot d’ordre est de ramener l’esprit à l’état originel.
La manipulation sera au cœur de cette relation dont chacun tirera profit à sa manière. Freddie verra dans « le maître » une figure paternelle alors même que celui-ci trouvera en Freddie une source d’inspiration quant à l’évolution de sa vision du monde et de l’homme. Un jeu de fascination et de perversion naîtra entre ces protagonistes.
Deux grands acteurs se rencontrent ici et nous prouvent toute l’étendue et la subtilité de leur jeu. Le réalisateur nous démontre à nouveau qu’il maîtrise avec style et passion l’art de diriger ses acteurs. Il ira d’ailleurs très loin dans le développement de ces personnages complexes. Tout est en effet parfaitement agencé (tant dans la mise en scène que dans l’échelle de plans ou le jeu des acteurs) pour rentrer au plus profond de leur psychologie troublante.
Dans son dernier film, Anderson traite à nouveau de la déviance, de la dérive et de ses dangers. Mais ils se matérialisent cette fois-ci principalement au travers de la scientologie, ce mouvement particulièrement controversé. Le thème de la relation torturée, familiale ou au sein d’une communauté s’y retrouve également. C’est aussi un discours ironique sur la condition humaine que le réalisateur met en avant. Alors que le « maitre » prêche auprès de Freddie (personnage uniquement régi par ses émotions) que l’homme n’est en rien un animal, ses actes et ses pensées prouvent le contraire.
Bien que le film s’attarde trop longuement sur la psychologie des personnages au détriment de l’action, le réalisateur semble bien avoir compris les tenants et les aboutissants de cet art caustique et particulièrement nuisible de manipuler les foules et les esprits les plus fragiles. Il nous dresse un portrait troublant et dérangeant sur les sectes et toute la noirceur qui en découle.
Bénédicte Eïd