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Coup de coeurNO

Pablo Larraín (Chili, France 2012)

Gael García Bernal, Alfredo Castro, Antonia Zegers, Marcial Tagle...

118 min.
1er mai 2013
NO

Chili, 1988. Lorsque le dictateur chilien Augusto Pinochet, face à la pression internationale, consent à organiser un référendum sur sa présidence, les dirigeants de l’opposition persuadent un jeune et brillant publicitaire, René Saavedra, de concevoir leur campagne. Avec peu de moyens mais des méthodes innovantes, Saavedra et son équipe construisent un plan audacieux pour libérer le pays de l’oppression, malgré la surveillance constante des hommes de Pinochet.

Troisième volet d’une trilogie consacrée à la dictature de Pinochet, « NO » mêle habilement fiction et images d’archives (le film est tourné dans le même format vidéo que les archives). Le grain de l’image et les couleurs désaturées plongent le spectateur dans une atmosphère des années 80 minutieusement reconstituée.

Pour endosser le rôle du publicitaire ambitieux, le réalisateur Pablo Lorrain fait appel à l’excellent Gael García Bernal, grande star mexicaine, mais aussi un acteur engagé.
Avec ses airs de mec branché qui gagne bien sa vie, ce publicitaire qui semble plutôt apolitique (contrairement à son ex-femme qui est une grande militante du non) décide d’appliquer les techniques du marketing à la campagne de l’opposition. Il propose de mettre l’accent sur la légèreté, l’optimisme et la joie au lieu de rappeler les malheurs du passé. Avec des courts spots colorés et des petits jingles, il va donc essayer de ‘vendre’ la démocratie comme un produit. Et lorsque le non l’emporte (avec 53 %), René Saavedra devient un héros malgré lui, il est après tout l’homme qui a réussi à mobiliser le peuple à renverser Pinochet.

Malgré cette victoire, la conclusion du film est tintée d’une certaine amertume, car à peine la campagne terminée, on voit René (et son chef qui avait travaillé quant à lui sur la campagne du oui) reprendre le job de publicitaire, comme si la victoire du non et le renversement de la dictature n’avaient été qu’un tournage de pub un peu plus ambitieux qu’à l’accoutumée. L’ambiguïté concernant l’éveil d’une conscience politique chez René demeure, et le côté arriviste du personnage semble inchangé. Cette fin douce-amère reflète à plus grande échelle la situation future du Chili : la dictature se finit, certes, mais la démocratie et le capitalisme ne s’avèrent pas être de toute joie…

Page d’histoire mais aussi une réflexion sur le pouvoir des images, « NO » est un film ingénieux, sérieux et amusant à la fois, bref, une brillante réussite à découvrir sans tarder.

Nadia Vodenitcharov