Coup de coeur
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Coup de coeurACTRICES

Valeria Bruni Tedeschi (France 2007 - distributeur : Cinéart)

Valeria Bruni Tedeschi, Noémie Lvovsky, Mathieu Amalric, Louis Garrel

118 min.
23 janvier 2008
ACTRICES

Une salle de théâtre - « Les amandiers » à Nanterre en hommage à Patrice Chéreau. Un metteur en scène demande à son actrice principale : « Etes-vous droitière ou gauchère ? ». Elle répond « Plutôt droitière… enfin je crois ».

Le ton est donné : celui de l’hésitation, du doute, du questionnement qui permet à l’actrice-réalisatrice de se mesurer à son propre mystère auquel elle donne, comme dans sa précédente réalisation « Il est plus difficile pour un chameau », la forme d’un autoportrait.

Autoportrait métaphorique, poétique, extravagant, paradoxal. Autoportrait dont la légèreté enchante et ouvre les portes d’un pays des merveilles. Les merveilles de Valeria. Graves et séduisantes.

Dessiné à la plume tantôt aérienne, tantôt mordante, « Actrices » donne à voir plus qu’il ne met en scène des êtres noués à leurs difficultés - que certains appellent névroses - et en même temps désireux de s’en échapper pour tenter l’aventure de la relation à l’autre.

A la fois généreux et égoïste, « Actrices » bat au rythme du cœur d’une jeune femme rappelée à l’ordre de la réalité par le tic tac d’une horloge biologique qui l’entraîne dans une sarabande joyeuse et triste, intelligente et sentimentale.

Un chouia de Woody Allen (ou de Nanni Moretti), un zeste de Becket, un doigt de Buster Keaton, et hop le charme opère. Le spectateur est ensorcelé et emporté dans un sillage de parfum élégant, burlesque et jazzy.

Cette actrice magique - qui est un peu l’alter ego du funambulesque Claude Melki (*) - s’est entourée de comédiens pleins de grâce, de sincérité et d’assurance fragile.

« Actrices » est un nénuphar. Il s’ouvre à celui qui le regarde avec des yeux lavés de toute vanité humaine. S’il ne s’est pas épanoui à une première vision, une deuxième fois est chaudement recommandée pour entrer dans les subtilités d’une âme qui combine imaginaire et réalité pour interroger le rapport au temps, aux hommes, à la mère et à l’enfant qu’il sera bientôt trop tard de concevoir.

Dans ce film « crawlant » entre introspection et facétie, il est souvent question du « Un mois à la campagne » de Tourgueniev.

Dans le souvenir que nous en garderons, il sera essentiellement question de « 1h 58 » passée en compagnie d’un être humain qui essaie de transmettre, par des mots et des images, ce qui s’agite au plus profond de lui. Et qui y réussit parce que sa force est faite de douceur et de sensibilité.

« Les cahiers du cinéma » et « Positif » consacrent à « Actrices », dans leur numéro de janvier 2008, des recensions qui motivent la curiosité. (m.c.a)

(*) « L’acrobate » de Jean-Daniel Pollet