Ecran témoin
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ALL THAT I LOVE

Jacek Borcuch (Pologne 2009)

Olga Frycz, Mateuz Kosciukiewicz, Jakub Gierszal

95 min.
23 novembre 2011
ALL THAT I LOVE

Riffs de guitare versus bruits de bottes. 

Il y a des oppositions dont les composantes sont fortes et exemplatives d’une époque qui met face à face deux besoins (celui de la continuité et celui du changement) et dès lors deux engagements.

Avec lesquels le compromis n’est pas possible. C’est ce qu’apprendra le fils adolescent d’un militaire de Gdansk en 1981. Il aime la musique de son époque, le punk et est amoureux de sa voisine, la fille d’une famille acquise aux idéaux de Lech Walesa et de son mouvement Solidarnosc

Le vent de l’histoire et celui des cœurs vont se mêler dans ce film attachant et romantique - Roméo et Juliette étaient, eux aussi, les enfants de lignages sans atome crochu - qui prend le parti faire entendre un appel au renouveau au travers d’un genre musical qui reflète une furieuse envie de vivre.

Une rage d’aimer, de s’amuser, d’extérioriser un irrépressible désir de faire bouger le cocotier du quotidien, de remettre en cause l’autorité paternelle, d’explorer des sentiers inconnus et parfois interdits.

Avec Borcuch nous ne sommes pas, comme chez Jia Zhang Ke de « Platform », dans une volonté aussi austère que poétique de capter les vibrations d’une jeunesse confrontée à une Chine en pleine mutation mais plutôt dans une veine intimiste - un peu comme dans « Blackboard jungle » de Richard Brooks.

Veine un peu superficielle (inconséquente ?) pour dessiner le portrait d’une génération charnière qui n’entend pas sacrifier ses élans juvéniles aux conflits d’un pays coincé entre passé et avenir, entre loi martiale et atmosphère révolutionnaire.

De ces derniers barouds avant la bascule dans l’âge adulte, on attendait une tension faite d’urgence et d’impétuosité et on est un peu déçu de constater qu’en bout de film ne reste qu’une description lisse, pas toujours très inspirée de teenagers pour laquelle la quête de valeurs nouvelles se confond souvent avec la demande de plus d’ « american way of life ».

Si la mise en scène est un peu trop prévisible et jouette, elle a néanmoins le mérite d’annoncer clairement la couleur : « All that … » n’a pas pour objet de saisir la dimension historique des événements qui ont brisé l’autorité soviétique dans un de ses pays satellites, mais de saisir l’occasion de ce contexte unique pour ancrer l’Histoire d’un pays à travers les rêves de ses moins de vingt ans.

Cette jeunesse, incarnée ici avec beaucoup de naturel et de fraîcheur, amenée à prendre conscience, comme dans la fable de La Fontaine « La cigale et la fourmi », qu’après avoir rock-en-rollé tout l’été, il faudra, quand la bise URSS viendra, payer.

Parce que pour les dissidents, la vraie vie n’a rien à voir avec les fantasmes.

Pour eux, la scène c’est aussi la prison ou l’exil.

Pour ceux que le cinéma polonais intéresse, rappelons le très intéressant focus consacré au sujet par Cinematek jusqu’à la fin de cette année. (mca)