John Malkovich, Paula Arundell, Eriq Ebouaney, Scott Cooper...
Disgrâce est un film magnifique adapté du roman éponyme du prix Nobel de littérature 2003 J.M.Coetzee.
Nous sommes en Afrique du Sud, après la fin de l’apartheid. Noirs et blancs sont censés cohabiter sur un pied d’égalité mais l’esprit de revanche et celui de l’ancienne soumission, l’insupportable sentiment de culpabilité et le fond d’arrogance pas mort ne peuvent disparaître sur décret sans soubresauts violents.
Le film commence à Cape Town dans un amphithéâtre d’université où des étudiants s’ennuient en écoutant John Malkovich –magistral - donner des cours de littérature romantique anglaise. Il est fou de Byron mais sa diction précieuse et une mélancolie consubstantielle et distinguée ne l’empêche pas de succomber au désir - « de feu », comme il dit - qui le pousse à séduire et mettre dans son lit une jeune étudiante noire. Il est chassé de l’université et le film change d’univers. On le retrouve dans la cambrousse, où sa fille mène une vie de fermière et il assiste impuissant au total et tragique renversement des rapports de force avec les Noirs.
La beauté sèche, âpre, désespérante des paysages accompagne le désarroi des personnages et justifie en partie leur incohérence.La sauvagerie de la nature nous enveloppe, soulignée par ces chiens furieux enfermés dans des cages et destinés à mourir. Dans une scène Malkovich tient dans ses bras un chien – noir - qui lui fait les yeux doux tandis qu’on l’anesthésie.Cette scène est emblématique du film où tant de choses contradictoires apparaissent sans souci de démonstration, ce qui rend la démonstration implacable : pudeur et cruauté, peur et énergie, culture et force dévastatrice.
A voir absolument.
( Monique Toussaint )