Autour de la guerre
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GRACE IS GONE

james C. Strouse (USA 2008 - distributeur : Paradiso Filmed Entertainment)

John Cusak, Shélan O’Keefe, Gracie Bednarczyk

92 min.
18 juin 2008
GRACE IS GONE

Grace est un prénom. Celui du personnage qui par son absence est la clé de voûte de cette première réalisation d’un jeune cinéaste qui avait coscénarisé le « Lonesome Jim » de Steve Buscemi.

Grace est aussi une qualité faite d’harmonie et de simplicité. C’est parce qu’elle fait défaut à ce film aux émotions exposés avec un manque de finesse égale à un débordement de prévisibilité que très vite un sentiment désagréable, celui d’être manipulé, envahit le mental du spectateur.

Inséré dans la très actuelle (*) envie américaine, qu’elle soit formatée hollywoodienne ou estampillée indépendante, de témoigner sur la guerre d’Irak, « Grace is gone » choisit d’aborder le conflit non pas de façon frontale mais par le biais d’un décryptage de ses effets collatéraux - comme le faisait mais avec moins d’afféterie et plus de punch « In the Valley of Elah » de Paul Haggis.

Grace, militaire en Irak, vient de mourir en service à Bassora. Comment Stanley, le père, va-t-il annoncer la nouvelle à ses deux enfants de 13 et 9 ans ?

En ex-militaire, Stanley fait le choix d’une tactique. Celle de la manœuvre dilatoire. Il offre à ses filles ce qu’il ne leur a jamais donné : de l’indulgence et du temps.

Le temps d’un voyage vers la Floride et ses parcs d’attractions (en fait de distractions au malheur) au cours duquel les enfants appréhendent la vérité, dédouanent leur père de sa maladresse affective et commencent un travail de deuil.

Film intimiste plus que film engagé, « Grace ... » se veut, selon les intentions de son réalisateur, une méditation sur la douleur.

Il est surtout une approche lourde, pathétique et difficilement crédible d’une réalité qui n’est jamais énoncée dans toute sa dimension de cruauté mais effleurée avec ce sens de la superficialité qui confond sensibilité et sensiblerie, sobriété et attitude bourrue, tendresse et situations tire-larmes.

Flirtant captieusement avec le mélo - toujours à deux doigts d’y tomber mais redressant au dernier moment la barre en acteur rêvant d’un Oscar - John Cusack à la fois touche et agace.

Parce qu’il est désemparé, on a envie de l’aider. Parce qu’il reste coincé sur des questions essentielles (est-ce seulement sa mauvaise vue ou son aveuglement d’époux conservateur et religieux qui a réparti dans le ménage Philips les tâches comme suit : la mère au combat, le père au foyer ? ), on a envie de le secouer.

Reste une jeune actrice, Shélan O’Keefe, qui avec justesse et mélancolie subodore, avant qu’elle ne soit révélée lors d’une pitoyable séquence finale, la vérité qu’un père dépassé par les événements a, laborieusement, celée.

La bande son est signée Clint Eastwood. Ce qui ne suffit pas à transformer « Grace… » en film intéressant et encore moins militant. (m.c.a)

(*) « Lions for lambs » de Robert Redford, « Rendition » de Gavin Hood, « Redacted » de Brian de Palma …