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Coup de coeurLUCY

Henner Winckler (Allemagne 2006 - distributeur : Ecran Total)

Kim Schnitzer, Gordon Schmidt, Feo Aladag

92 min.
15 août 2007
LUCY

Il arrive de s’attacher à un personnage de fiction et de se demander ce qui lui arrivera au-delà de la fin du film. C’est le cas avec la petite Lucy, ce bébé qui grandit (ou du moins essaye) à l’ombre de Maggy, sa jeune mère de 18 ans.

Son sourire et son calme d’enfançon déjà conscient que la vie n’est pas un chemin de velours aideront-ils Maggy à se responsabiliser et à poser sur sa fille une attention qui dure plus longtemps qu’une pause-langes-biberons entre deux errances amoureuses ?

Questions qui resteront sans réponse mais dont la réactive formulation est l’indice de l’intérêt que le spectateur porte à ces deux vies. L’une en son début, l’autre à un tournant délicat à négocier puisqu’il demande de renoncer aux hasards des rencontres pour se focaliser sur les nécessités de l’adulte à faire face ce qu’il a engendré.

Depuis quelques années, le cinéma allemand (*) s’impose, avec une constante lucidité, comme étant celui qui propose la vision la plus serrée des inquiétudes de la fin de l’adolescence, cette fragile période qui précède l’entrée, redoutée, en maturité.

Cet été, l’Ecran Total, en trois films à l’écriture sobre et à l’interprétation remarquable, a intelligemment mis en évidence la vigueur de cette assomption.

Dans « L’imposteur », Christoph Hochhaüsler raconte l’histoire d’un jeune homme qui s’accuse de crimes qu’il n’a pas commis.
Dans « Montag », Ulrich Kohler s’intéresse à une jeune femme qui déserte le domicile familial, en déroute devant ses responsabilités conjugales et maternelles.

« Lucy » reprend, en les développant avec une sensibilité distanciée, ces thèmes de l’indécision et du désarroi en les scotchant à Maggy, jeune fille dépassée par un rôle auquel son jeune âge ne l’a pas préparée et qu’elle ne sait pas comment assumer.

Film souterrainement intense, il cerne, sans jamais juger ou moraliser, les oscillations d’un cœur tiraillé entre l’envie de prolonger une existence égoïste et celle d’en sortir, aimanté par la force d’une affection, dont il découvre, à petits pas, la puissance : l’amour maternel.

L’ombre de Boris Cyrulnick rôde sur cette réalisation pudique : et si on faisait confiance, comme le suggère le dernier plan du film, à cette résilience capable de transformer les blessures en occasions de mûrir ?

Alors, peut-être, que Lucy enfin aimée et respectée, comme dans la chanson des Beatles, verrait des diamants dans le ciel... (m.c.a)

(*) lire l’intéressant dossier « Quo vadis Germania » de Michel Cieutat paru dans le numéro 554 du magazine Positif