Drame
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Coup de coeurMON COLONEL

Laurent Herbiet (France 2006 - distributeur : Benelux Film Distribution)

Olivier Gourmet, Robinson Stévenin, Cécile De France

100 min.
11 juillet 2007
MON COLONEL

L’été dernier, dans le cadre de l’Ecran Total, cette magnifique « plage cinéma » proposée tous les ans par le cinéma Arenberg à Bruxelles (*), était distribué, en catégorie « Les inédits », de Philippe Faucon « La trahison ».

Dans ce beau film, traité avec la rigueur sèche d’un documentaire, Faucon abordait la question de l’Algérie et de sa guerre de décolonisation à la fin des années 1950. A travers les acteurs algériens et français de cette période troublée, la question du rôle et de la responsabilité tenus par chacun était traitée sans détour jésuitique mais aussi sans brusquerie inutile. Tentative d’objectivité qui donnait au propos sa densité et son audace.

Cette année, c’est au Vendôme qu’il est proposé au spectateur de reprendre ce chapitre de l’Histoire qui garde, près d’un demi siècle plus tard, le même poids de mauvaise conscience, de culpabilité et d’amertume.

En 2006 le colonel Duplan qui, en 1957, commandait la garnison de Saint-Arnaud dans l’Est algérien est assassiné. L’armée et la police, au cours de leur enquête, vont remuer un passé que certains préféraient laisser assoupi.

Le parti pris de Laurent Herbiet de rendre palpables les failles laissées par cette période dans la mémoire contemporaine est intéressant. L’alternance de scènes du présent sous forme d’interrogatoires et de flash backs est une bonne idée. On peut juste peut-être regretter le déséquilibre de la mise en pellicule entre les deux niveaux de récits.

Aujourd’hui ne vaut pas hier. A la fois parce que les acteurs "2006" n’ont pas la conviction de ceux de "1957" et que leurs réactions ressortissent à une construction scénaristique qui réserve une trop grande place au souci didactique et au déploiement de la mécanique judiciaire.

Par contre le traitement des événements de 1957 est traité avec une subtilité qui réussit à être passionnante et engagée sans céder aux prises de position faciles et émotionnellement débordantes.

Cette juste acuité doit beaucoup à Olivier Gourmet qui réussit en conjuguant les qualités
d’une crapule à celles attendues d’un responsable militaire en période difficile à damer le pion
à une jeune recrue (un lumineusement intelligent Robinson Stévenin) dont l’innocence, avant de se ressaisir, sera tentée par les chemins boueux des plus viles exactions.

« Mon colonel » a quelque chose de la force de « La question » de Laurent Heynemann ou de
« L’honneur d’un capitaine » de Pierre Schoendoerffer. Il met le doigt sur la capacité pour toute âme de transgresser l’obligation de respecter l’intégrité physique et morale d’autrui. Et ceci tout autant au nom de nécessités événementielles qu’au nom d’un sadisme latent qui demande bien peu pour être activé.

C’est le premier film de Laurent Herbiet (**). C’est un coup réussi. Dans lequel, il ne faut pas l’oublier, Costa-Gavras a sa place puisqu’il cosigne, avec Jean-Claude Grumberg, le scénario. (m.c.a)

(*) pour plus d’informations consulter le site www.arenberg.be
(**) jusqu’à présent premier assistant sur notamment « Pas sur la bouche » d’Alain Resnais ou « Palais Royal » ( !) de Valérie Lemercier.