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Quitter la nuit

Delphine Girard

Selma Alaoui, Veerle Baetens, Guillaume Duhesme

108 min.
21 février 2024
Quitter la nuit

Quand on quitte la nuit, que reste-il au lever du jour ? Dans ce premier long-métrage puissant, Delphine Girard raconte les traces indélébiles d’une nuit qui va changer la vie des trois protagonistes à tout jamais.
"Quitter la nuit" commence avec une scène haletante où une femme, Aly (Selma Alaoui), en voiture en présence de son agresseur, Dary (Guillaume Duhesme), essaie de demander de l’aide à une autre femme, une opératrice d’appel d’urgence.
Ce film est le fruit de longues années de travail et la suite et du court-métrage que Delphine Girard a réalisé six années auparavant. À l’époque, le court-métrage avait pour titre "Une sœur", un titre évocateur car Aly, durant son appel, fait passer l’opératrice pour sa sœur, mais surtout car à la fin de cet appel, un lien de sororité s’est construit entre les deux femmes.
"Une sœur" avait attiré l’œil de nombreux festivals lors de sa sortie et avait été notamment nommé aux Oscars (rien que ça !) et aux Magritte, dont il était sorti bredouille. Cependant, avec la prolongation de son court en long, Delphine Girard nous plonge dans l’après d’un évènement bouleversant et décisif. Que reste-il après un évènement pareil ? Quand cet évènement prend fin, les conséquences de celui-ci, elles, ne font que commencer, que ce soit pour Aly, bien-sûr, mais aussi pour l’opératrice (interprétée par l’excellente Veerle Baetens) et pour l’agresseur. Tous les trois subissent les conséquences de cet évènement, à des degrés évidemment bien différents.
Explorer l’intériorité de chacun des trois protagonistes, y compris celui de l’agresseur, est une décision que la réalisatrice explique, durant l’avant-première du film à Bruxelles, avoir eu en tête dès l’écriture du long-métrage. C’était, pour elle, une volonté non pas de juger mais d’essayer de comprendre. Une démarche sincère et qui fonctionne redoutablement bien. Plus que de vouloir faire ressentir une forme d’empathie pour un personnage ayant commis des actes impardonnables, c’est surtout comprendre que cet évènement a un impact sur lui également mais aussi sur son entourage. Tous, protagonistes et proches, subissent, ensemble, les conséquences, à des degrés divers.
"Quitter la nuit" brille dans la démonstration d’une douleur collective ; ces peines partagées mais pas comprises à 100%, et le rassemblement qu’elles opèrent également sur les individus, ou leur désunion. Un film plein d’humanité, tout aussi réussi que son prédécesseur et qui réussit à traiter d’un sujet actuel, à l’heure où les violences subies par les femmes sont plus que d’actualité.

Flore Mouchet