llham Mohamed Osman, Kaltuma Mohamed Abdi, Fathia Mohamed Absie
En 1960, la Somalie devient indépendante. En 1969, Siad Barre accède au pouvoir à la suite d’un coup d’État et règne pendant plus de vingt ans. Depuis la chute de ce dictateur, la lutte pour le pouvoir n’a cessé de diviser le pays, transformant la Somalie en une république morcelée. C’est sur fond d’images d’archives illustrant ce contexte que débute le film Samia, offrant ainsi une précieuse contextualisation de l’histoire de Samia Yusuf Omar.
Dès son plus jeune âge, Samia (incarnée par Ilham Mohamed Osman) se distingue par sa rapidité. Après l’avoir vue battre son frère Ali, ce dernier, bien qu’affecté par la défaite, décide de devenir son entraîneur. Mais dans un pays ravagé par les conflits, les entraînements sont semés d’embûches. Samia ne peut pas courir librement. Les filles n’ont pas le droit de courir — et encore moins sans voile. Elle s’entraîne alors la nuit, dans les rues de Mogadiscio, pour échapper à l’armée. Persévérante, elle se prépare sans relâche pour participer aux Jeux Olympiques de Pékin en 2008, et rêve de pouvoir être présente à ceux de Londres en 2012.
Inspiré de l’histoire vraie de Samia Yusuf Omar et du roman à succès Ne me dis pas que tu as peur de Giuseppe Catozzella, ce film dresse le portrait bouleversant d’une jeune athlète animée par une passion inébranlable. Mais il ne s’agit pas uniquement d’un rêve individuel. Il s’agit d’un rêve de liberté, d’un combat pour l’égalité, pour les droits des femmes, pour l’indépendance, et contre les extrémismes.
La narration du film adopte une structure non linéaire, ponctuée de longs flashbacks qui enrichissent la profondeur des personnages. La photographie, brute et sans fard, reflète la dureté du récit. La bande-son, quant à elle, joue un rôle essentiel : elle nous fait ressentir la course de Samia, elle nous transporte dans ses rêves.
Si l’esthétique du film ne cherche pas à éblouir, c’est le récit qui capte l’attention. Samia est un film nécessaire, porté par des messages avant tout politiques. Certes, il met en lumière l’importance de croire en ses rêves et de se battre pour les atteindre, mais surtout, il donne une voix à celles et ceux que l’on n’écoute pas. Samia incarne à la fois la femme opprimée et le migrant en quête d’une vie digne, d’une simple possibilité de vivre.
À travers le destin tragique de cette jeune athlète, les réalisateurs ne livrent pas un simple biopic : ils dénoncent des réalités sociales que nous connaissons trop bien, mais contre lesquelles nous agissons trop peu.
Astrid De Munter