les membres du groupe Staff Benda Bilili, les enfants des rues (les shégués) et autres habitants de Kinshasa ....
Septembre, le mois des odyssées musicales ? Après le torrent d’énergie chaotique du group glam rock « The runaways » sorti la semaine dernière, les spots sont dirigés, depuis ce mercredi, sur un bouillonnant groupe congolais, le Staff Benda Bilili.
Espèce d’OVNI tonique, titillé par différents genres musicaux ( le funk, le pop, le reggae, la rumba), auquel les réalisateurs s’étaient déjà intéressés en 2004 dans leur documentaire « La danse de Jupiter » - consacré à la musique des ghettos de Kinshasa - et qu’ils vont suivre pendant 6 ans sur le laborieux et ascendant chemin qui le mènera d’un zoo local miteux à la reconnaissance internationale.
Insurgé de la résignation - la majorité des musiciens sont des rescapés de la poliomyélite - le groupe a mis le feu au dernier festival de Cannes comme il le met depuis longtemps dans les rue africaines et depuis peu sur les scènes européennes.
Avant d’être séduites par le punch humaniste qui se dégage de ces parcours d’hommes qui refusent le fatalisme d’être nés et d’avoir traînés, avant de se rencontrer et de rencontrer la Musique, sur les trottoirs de la misère et de la déréliction kinoises, nous étions perplexes.
« Benda … » ne risquait-il pas d’être soit une œuvre de propagande - on se souvient qu’en 2005 lors des premières élections démocratiques depuis 2005, le taux élevé de participation au vote a été imputé à la chanson « Allons voter » enregistrée par le Staff (*) - soit une tentative de récupérer la pitié suscitée par un team composé de paraplégiques.
Soit encore la cynique détermination de deux documentaristes ( anciens publicitaires) de gonfler ou pire d’instrumentaliser, à des fins mercantiles, une success story prompte à émouvoir parce qu’elle entrecroise des destins pathétiques et apparemment (**) sans issue.
Très vite, on est rassuré. « Benda .. » n’est pas un film misérabiliste, récupérateur, il est une ode (***) à la joie, à la débrouillardise, à la solidarité. A la vie qui se mange, se boit, se chante, se danse sans compter.
Même s’il n’évite pas les faiblesses - une complaisance pour la misère, un goût parfois agaçant pour le pittoresque et le conte de fées, une caméra un peu lourde - le film emporte par sa vitalité, sa drôlerie, sa dignité, son enthousiasme et la leçon d’espoir qu’il charrie.
On en sort content. Et conscient - est-ce paradoxal ? - qu’il en faut du courage et de la chance pour s’extraire d’un quotidien africain outrageusement gangrené par le « blues »
Est-ce à cela que pense le plus jeune membre du groupe - qui mêle avec aisance les âges et les tempéraments - lorsqu’il regarde, lors de la dernière image du film, par la fenêtre d’un hôtel sans âme ?
Le groupe a reçu le trophée du meilleur artiste de l’année lors du festival World Music Expo 2009 (mca)
(*) qui n’ayant pas été rémunéré pour l’utilisation de sa chanson n’a pas hésité à porter plainte … contre l’ONU
(**) la traduction de Benda Bilili : « au-delà des apparences »
(***) filant un sacré coup de vieux au film de George Walker Young@heart mettant en scène une chorale d’octogénaires rockeurs.