Anthony Hopkins, Ray Winston, Angelina Jolie, Robin Wright Penn
Est-ce parce qu’il est le premier film entièrement « cloné » que « Beowulf » donne le bourdon ? Et fait comprendre tout à trac au spectateur qui n’a plus vingt ans qu’il va devoir s’accrocher pour sauter dans le train d’une certaine modernité.
Si « Beowulf » se contenait d’être une mauvaise histoire d’héroïc fantasy, il ne resterait pas longtemps dans nos mémoires. Mais parce qu’il se fonde sur un procédé technique, la « performance ou motion capture » (*) porté à un point d’incandescence, il pose une question cruciale pour l’avenir du cinéma grand public.
Suffira-t-il de fournir au spectateur lambda et de préférence biberonné aux jeux video un produit technologiquement innovant pour emporter son adhésion et mériter ses étoiles alors même que sa narration est nullissime, basée sur une interprétation boursouflée (qui fait penser au nauséeux "300" de Zack Snyder) et des dialogues auprès desquels ceux de « la Star Ac » ressemblent à du Beckett ?
Il est encore un peu tôt pour répondre à cette question, mais avec « Beowulf », débile adaptation d’une légende médiévale mettant aux prises un vaillant guerrier goth et un monstre, le débat est ouvert.
La « performance capture » annonce-t-elle une bataille d’Hernani opposant les traditionalistes aux expérimentaux ?
Ou la 3D est-elle une révolution gagnée d’avance tout simplement parce qu’elle colle à l’évolution d’un monde où le réel et le virtuel sont destinés à faire couple et où l’envie d’être formellement bluffé l’emporte sur le désir d’être conquis par l’intelligence d’un contenu ?
Considérant les projets de retravailler « Singing in the rain » et « Star wars » pour les étoffer d’une dimension supplémentaire, il semble bien que les questions aient déjà trouvé réponse.
Quoique la résistance s’organise. Les Studios Pixar ont tenu, pour leur réjouissant « Ratatouille », à préciser que leur film était « 100% pure animation - No motion capture ! ».
Cette précision résonne comme une revendication éthique. Qui fait penser au label équitable créé par l’association Max Havelaar pour défendre un commerce de qualité.
A quand une asbl semblable - on pourrait l’appeler « Play time » en référence au chef d’œuvre de Jacques Tati - pour refuser que le cinéma devienne juste une technique. Et reste ce qu’il est : un art. (m.c.a)
(*) Cette procédure optique permet de mouler, à partir de personnes réelles, des personnages animés et de les doter d’une troisième dimension. Le Figaro Magazine dans son numéro du 19 novembre 2007 a consacré un article à ce sujet. Il est à lire sur le site www.lefigaro.fr
(*) Tom Hanks a prêté son visage aux héros du film d’animation « The polar express » du même Zemeckis. Dans « Beowulf » si l’on ne s’étonne pas de la participation d’Angelina Jolie, l’ex Lara Croft, à ce jeu du copier-créer, celle du septuagénaire Anthony Hopkins est plus surprenante. Effet de mode, volonté de rester "in", recherche d’une nouvelle forme d’expression, ou manque de proposition plus intéressante ?