Conte de fée
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BIRD PEOPLE

Pascale Ferran

Anaïs Demoustier, Josh Charles, Roschdy Zem

128 min.
2 juillet 2014
BIRD PEOPLE

Une foule de gens, fourmillante, emportée dans le flux du quotidien, suivant un courant de vie qui jamais ne semble s’arrêter ; l’horloge du Temps ancrée dans le béton et qui a la fixité de l’éternité, la course habituelle et rectiligne d’anonymes qu’un temps mathématique et objectif presse et stresse, encore et encore… Des gens et toujours des gens, hyper connectés via leur smartphone ou leur tablette, qui, noyés dans un océan humain, se referment dans leur petite bulle ; des gens, toujours des gens qui, le temps d’un trajet, se retrouvent côte à côte mais ne se parlent pas, pensent, téléphonent, écoutent de la musique, rêvassent, planifient le lendemain… Telles sont les premières images qui rythment magnifiquement le dernier film de Pascale Ferran, la réalisatrice multi-césarisée en 2007 pour son Lady Chatterley . Le rythme y est, les plans sont de toute beauté ; puis le cadre se rétrécit et se fixe sur deux drôles d’oiseaux : Gary Newman, un ingénieur américain vivant entre deux avions, en transit dans un hôtel à proximité de Roissy, et Audrey Camuzet, une jeune femme de chambre qui passe d’une chambre à l’autre pour effectuer, jour après jour, les mêmes gestes. Tous deux rêvent d’un autre envol : il décide de tout abandonner ; elle fait une rencontre extraordinaire aussi volatile qu’éphémère…
 
Film inclassable, à mi-chemin entre la fable onirique et poétique, la tragi-comédie humaine et sociale, et un conte de fées dont les formes traditionnelles ont été sacrément bousculées, Bird People est un oiseau rare qui s’apprivoise avec le sublime de l’étonnement et l’urgence de la patience. Ancré dans la réalité tout autant qu’il déploie les ailes de l’imaginaire, Bird People explore avec minutie les travers d’une société qui éloigne les gens autant qu’elle les rapproche. « J’espère en tous cas qu’en sortant du film, le spectateur sera plus content qu’à son arrivée dans la salle. Je souhaite que son horizon se sera élargi, que le film lui aura redonné de la vision, de l’air, de l’espoir, la capacité de rêver, qu’il lui aura redonné une forme d’émerveillement et de poésie sur le monde. », nous confiait Pascale Ferran lors d’une récente entrevue. (A découvrir sur ce site http://cinefemme.be/interview?ivw=69 )

« Today is gonna be the day / You hear somebody say / We need you wide awake” chante Agnes Obel dans son titre “Just so”. Ces paroles offrent un bel écho à l’invite sensible et poétique que nous propose Pascale Ferran : écarquillons les yeux sur le monde avec l’émerveillement d’un enfant car c’est là où naît l’enfance de l’art, car c’est là où s’éveille et se renouvelle chaque jour l’art de la vie.

( Christie Huysmans )