Chronique dramatique
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BOBBY

de et avec Emilio Estevez (USA 2007 - distributeur : BFD)

Sharon Stone, Demi Moore, Lindsay Lohan, Helen Hunt, Martin Sheen, Anthony Hopkins

119 min.
24 janvier 2007
BOBBY

Juin 1968. Los Angeles. Hôtel Ambassador.
Quelques heures avant l’assassinat de Robert Kennedy. « Bobby » pour tous ceux, et ils étaient nombreux, qui l’aimaient et le soutenaient dans sa campagne pour l’investiture à la présidence des Etats-Unis.

Un candidat auquel le cinéaste voue une admiration appuyée et qui pourrait même agacer si elle n’était doublée d’un portrait puzzlé d’une certaine Amérique généreuse, soucieuse d’égalité, de solidarité et qui voit ses illusions de « better days » se fracasser parce que celui censé l’incarner s’effondre, dans une cuisine, sous les balles tirées par Shiran Shiran

Le montage du film est intéressant parce qu’il se décline sur deux plans à la fois distincts et complémentaires. Au destin tragique d’un fils de famille mythifiée depuis l’assassinat 5 ans auparavant d’un frère aîné, répondent 22 destins d’hommes et femmes ordinaires qui incarnent chacun à leur façon une image de la vie.

Généreuse pour cette jeune fille qui épouse un garçon pour lui éviter le Vietnam, rédemptrice pour un couple au bord de la rupture, consolatrice pour un vieux groom solitaire, miséricordieuse par la grâce d’une femme capable de pardonner l’époux qui la trompe.

« Bobby » est un film choral, moins équilibré que ceux d’Altman parce que plus roublard et articulé autour de saynètes trop gentilles pour êtres entièrement crédibles, scandées autour d’une élection primaire démocrate en Californie.

En amont une montée des espérances des protagonistes vers plus de justice et de tolérance, en aval une submersion de ces mêmes protagonistes, lorsque leur candidat est assassiné, par la panique et l’effroi qui soulignent la fragilité contingente de leurs rêves.

L’état des Etats-Unis en cette fin des sixties, enlisés au Vietnam, renvoie à l’image d’une actualité américaine embourbée en Irak.

Il semblerait même que le casting exceptionnel de « Bobby » ait été motivé par la volonté des acteurs de souligner à quel point les thèmes de la campagne kennedyenne - luttes contre la pauvreté, le racisme, la violence croissante, la dégradation de l’environnement – sont aussi d’aujourd’hui et auxquels on n’accorde pas assez d’attention.

Ces bonnes intentions sont-elles suffisantes pour faire de « Bobby » un film politique ?
En tout cas elles en font un film idéologique (*) et chacun sait que les idéologies comportent leur part de subjectivité et de manigance qui ne sont pas nécessairement transmissibles à tous.

C’est pourquoi « Bobby » est un film attachant quand il raconte la grande Histoire à travers de petites histoires mais un film défiant lorsqu’il se veut démonstratif et exemplatif.

En effet qui peut dire que si Bobby n’était pas mort, il aurait tenu ses promesses ? (m.c.a)

(*) Le réalisateur ne cache pas que son père, Martin Sheen, était un ami/supporter de Bob Kennedy. Et que le souvenir qu’il garde de sa poignée de mains échangée avec l’homme politique lorsqu’il était enfant est le moment fondateur de sa réflexion citoyenne.