CLIENTE

S’interroger sur la sexualité féminine n’est pas un sujet évident au cinéma. Surtout lorsqu’il s’agit de la vie affective d’une femme de cinquante ans, qui trouve son épanouissement dans des relations éphémères avec des gigolos.

C’est une des belles facettes de « Cliente » que de toucher à cette sensibilité-là, celle de femmes qui se retrouvent seules à la cinquantaine, soit parce qu’elles n’ont jamais rencontré quelqu’un avec qui partager quelque chose de durable, soit parce qu’elles ont divorcé.

Elles se retrouvent à un âge où elles ne peuvent plus avoir d’enfant, un âge où la volonté de partager son quotidien est encore présente mais d’une façon autre, déplacée et pas toujours évidente à envisager.

C’est l’histoire de Judith, femme libre, telle qu’elle se décrit elle-même, qui rencontre au détour d’un rendez-vous de plus avec un gigolo, un homme auquel elle s’attache, malgré elle.

En miroir inversé, c’est aussi l’histoire de sa sœur, Annie, qui au même âge, rencontre elle l’âme sœur et quitte tout pour lui. « Cliente » est la tentative de décrire les sentiments vécus par toutes ces femmes, qui vivent chacune à leur manière la relation physique et amoureuse.

Et puis c’est aussi le point de vue du gigolo lui-même, perdu entre ces liaisons payantes et sa vie d’homme marié et aimant.

Une multitude de regards qui est rassemblée dans « Cliente » et donnée à entendre par le biais d’une pluralité de voix over, celles des différents protagonistes, qui chacun à leur tour, prennent la parole et décrivent leur émotions.

Et c’est la que le bât blesse. Parce que si la thématique du film est louable, sa réalisation, elle, n’est que très peu convaincante.

Il y a tout d’abord cette diversité de voix over, inégales et parfois surfaites. Elles se posent comme une béquille à l’image. Comme si ces dernières n’étaient pas suffisantes pour suggérer le ressenti des personnages. Il en résulte une sorte de lourdeur extrême.

Un autre aspect dérangeant est le jeu des acteurs. Malgré la présence d’interprètes aussi brillants que Nathalie Baye, Isabelle Carré ou Eric Caravaca, on ne peut pas dire que le film soit bien joué. A nouveau, la prestation des acteurs a quelque chose de forcé, d’exagéré. Au lieu de spontanéité, de finesse, « Cliente » use du gros trait.

Un gros trait qui se retrouve dans les choix de la réalisation - le convenu est poussé au stéréotype, et la bande son est peuplée de morceaux rap exaspérants.

« Cliente » est un film qui fatigue par sa forme. Par son aspect grossier, non pas dans le sens brut, mais dans une dimension compassée, brouillonne et caricaturale.  

(Justine Gustin)