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Délicieux

Éric Besnard

Grégory Gadebois, Isabelle Carré, Benjamin Lavernhe, Guillaume De Tonquédec

110 min.
15 septembre 2021
Délicieux

En 1765, Quartier du Louvre à Paris : Mathurin Roze de Chantoiseau ouvre le premier restaurant moderne avec des tables individuelles et des plats à choisir sur un menu. C’est tout simplement une révolution car manger à l’extérieur était une activité réservée aux voyageurs.

On mangeait, dans des tavernes ou des auberges, sur des tables collectives, un plat unique censé rassasier. Bien manger était l’affaire des nobles. Près de 20 ans avant la Révolution, cet homme venait d’inventer un nouveau concept en rupture avec les privilèges de l’Ancien Régime. Alors que le mot « restaurant » signifiait « consommé ou bouillon », Mathurin Roze de Chantoiseau va lui donner un nouveau sens : le lieu où l’on paye pour apprécier un plat.

C’est cette évolution /révolution, c’est à dire la création du premier restaurant que nous conte le film « Délicieux » : en 1789, Pierre Manceron (Grégory Gadebois) est le cuisinier audacieux mais orgueilleux d’un aristocrate gastronome, le duc de Chamfort (Benjamin Lavernhe). Limogé pour avoir osé inventer une « bouchée apéritive », il s’installe avec son fils dans un relais de poste. Une femme étonnante et mystérieuse (Isabelle Carré) vient se proposer comme apprentie pour apprendre l’art culinaire dans un but très précis que le spectateur découvrira. Après moult péripéties, ils parviendront à transformer un vulgaire relais de poste en ce qui deviendra un restaurant.

Ce conte historique est savoureux. Il transporte le spectateur, scène après scène de l’ambiance faste et guindée des « soupers » du Duc, au clair-obscur des cuisines où Manceron officie comme un chef d’orchestre pour offrir au Duc et à ses invités- dont un ecclésiastique, modèle de fatuité et de mépris- la perfection de la cuisine d’alors.

L’histoire est là, présente, sous la forme d’allusions aux mouvements qui se profilent : l’esprit des lumières incarné par le fils de Manceron, les idées d’émancipation avec la Révolution qui couve.
Le film est servi par des acteurs très justes, Grégory Gadebois joue à la perfection Manceron, rendant, selon les scènes, sa force et sa douceur. Benjamin Lavernhe en Duc est éblouissant, Guillaume de Tonquédec en intendant guindé très drôle et Isabelle Carré énigmatique à souhait.
Un film savoureux dont on ressort, joyeux, les yeux ravis, pleins d’images de décors de l’époque, de préparations culinaires d’antan, de jeux de mots et de situations cocasses, faisant de ce film une ode à la cuisine conçue comme un art désormais accessible à tout un chacun.

(France Soubeyran)