Tranche de vie
2étoile(s) 2étoile(s) 2étoile(s) 2étoile(s) 2étoile(s)

LE FILS DE L’EPICIER

Eric Guirardo (France 2007 - distributeur : Benelux Film Distributors)

Nicolas Cazalé, Clotilde Hesmes, Daniel Duval, Jeanne Goupil, Paul Crauchet

96 min.
28 novembre 2007
LE FILS DE L'EPICIER

Quelle est la différence entre un bon film et un film agréable ? Le fait peut-être que le premier tient ses promesses jusqu’au bout.

C’est précisément le cas de ce film d’Eric Guirardo qui ne manque pas d’atouts mais n’arrive pas à tenir la distance dans leur développement. Sans doute parce qu’il sacrifie, à mi parcours, le registre de l’authenticité à celui de la prévisibilité.

Pour remplacer son père victime d’un infarctus et aider sa mère dans son commerce d’épicerie ambulante, Antoine décide de revenir dans le village natal qu’il avait fui quelques dix ans plus tôt.

Le bonus de « Le fils… » est de rompre avec le besoin (pervers ?) d’un certain cinéma de présenter de l’homme une version corrompue et désenchantée de lui-même. Il y a dans son squelette de construction quelque chose de sain qui porte à garder foi dans les relations que les hommes tissent entre eux.

Le regard de Guirardo n’est pas naïf, il est confiant. Confiant dans l’apaisement qui peut s’installer entre un père autoritaire et ses fils. Confiant dans le pont d’entraide qui peut se construire entre les générations. Confiant dans le fait que le retour aux sources est le point omega des errances (erreurs ?) de jeunesse.

Porté par des comédiens qui manifestement croient aux personnages qu’ils défendent - avec une mention spéciale pour le sourire craquant de Clotilde Hesmes et la capacité de Nicolas Cazalé de sortir, par la tendresse, d’un égoïsme grognon - « Le fils … » ouvre une fenêtre sur une France rurale souvent oubliée (sauf de Manuel Poirier et de Jean Becker)

Une France dont les paysages (ceux du Massif central) à perte de vue reposent des agitations de la ville. Une France dont les habitants sont humbles (sans être misérables), vieux (sans être décatis), solidaires les uns des autres (tout en étant resquilleurs).

Il y a quelque chose de l’ambiance des films d’avant « La nouvelle vague » dans « Le fils... » Sans doute est-ce dû à la place importante réservée à de succulents seconds rôles : une Jeanne Goupil(*) qui n’a rien perdu du charme corsé repéré par Joël Seria, une Liliane Rovère aussi gouailleuse que peste, et un Paul Crauchet qui arrive à donner du pep à une sénilité redoutée.

Il y a du goût pour les autres dans ce joli film dont la lenteur est l’ingrédient indispensable à
l’émergence d’une bien sympathique générosité que seuls les cyniques se risqueront à trouver trop consensuelle. (m.c.a)

(*) « Charlie et ses deux nénettes », « Les galettes de Pont-Aven », « Marie-Poupée »