Autour d’un film
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LE VOYAGE DU BALLON ROUGE

Hou Hsiao Hsien (Chine 2007 - distributeur : Benelux Films Distributors)

Juliette Binoche, Louise Margolin, Simon Iteani, Hippolyte Girardot

112 min.
16 février 2008
LE VOYAGE DU BALLON ROUGE

Un des paris les plus hasardeux dans la vie d’un cinéfan est de revoir un film qui l’avait enchanté lorsqu’il était enfant.

Pari à deux branches également risquées.

Revoir le film dans sa matrice originelle engendrera-t-il une déception ?
Voir le film dans une adaptation contemporaine tiendra-t-il la comparaison, qui comme on le sait n’est pas faite que de raison ?

Un petit garçon libère un ballon rouge d’un réverbère dans le Paris des années 1950. A la surprise des gens qu’il croise, au nez et à la barbe de la convoitise de ses amis, le ballon le suit partout. Boussole magique qui, comme une lune que l’on décroche, permet de poser sur les choses un regard poétique qui séduit encore cinquante ans après la sortie de ce beau film - Prix Louis Delluc 1956 - de Jacques Lamorisse .

Hou Hsiao Hsen (HHH pour les initiés), ce vétéran du cinéma taïwanais au style lent et contemplatif, a accepté de revisiter cette œuvre - bonne idée en soi mais qui très vite tourne au pensum…immanent. C’est-à-dire auto-construit sur ses errances internes sans être vivifié par une recherche de point de vue unificateur.

Savait-il qu’il s’attelait, en apportant son propre regard sur un film qui a laissé, dans les âmes de ceux qui l’on vu, la poussière dorée d’un moment béni, à une mission (quasi) impossible à mener ?

Trop étiré à l’égal d’un titre auquel l’adjonction du mot voyage enlève une partie de la spontanéité

imaginative uniquement centrée par Lamorisse sur « Le ballon rouge ».

A la fois trop dispersé et trop précis dans un ensemble de détails (*) qui enlèvent l’envie de trouver un sens aux dissonances des personnages, l’adaptation de HHH manque d’Hinspiration.

Elle laisse planer le doute d’avoir voulu subtiliser une approche poétique du monde au profit d’une
réflexion plus intellectuelle, plus sociologique.

Faut-il voir dans l’affadissement/détournement de ce « Voyage.. . » le fait qu’il soit une œuvre de commande du musée d’Orsay et non le résultat d’une envie naturelle du réalisateur - ce qui pourrait expliquer les mystères de sa construction ?

Peut-être. Mais pas seulement. Il existe peut-être dans cette impression de ratage le subtil ostracisme
de ceux qui acceptent sans enthousiasme que l’on touche à l’un de leurs plus attachants souvenirs
cinématographiques.

Pour ceux qui ont envie d’en savoir plus sur les intentions du réalisateur, des éclaircissements (très tirés par les … fils des marionnettes auxquels le cinéaste à consacré en 1993 un de ses beaux films « The puppetmaster ») sont proposés par « Les cahiers du cinéma » de février 2008. 

Si vous n’êtes pas un accroc à la couleur rouge, vous pouvez revoir « Le ballon blanc » de Jafar Panahi, une autre déclinaison de l’importance, dans une vie d’enfant, de ce bout de caoutchouc qui se moque des frontières, des différences sociales, religieuses et ethniques. (m.c.a)

(*) Le spectateur se perd facilement entre une mère célibataire, marionnettiste et débordée (une Juliette Binoche à qui la peroxydation n’apporte rien mais enlève beaucoup d’une habituelle authenticité), une jeune fille au pair étudiante en cinéma et la douceur un peu fade d’un petit garçon qui semblent, tous, flotter au hasard. En l’absence d’un récit qui soit - même minimalement - scénarisé.