Paul Kircher, Angelina Woreth, Gilles Lellouche, Anaïs Demoustier, Ludivine Sagnier
C’est dans la France de la périphérie, comme l’on dit beaucoup aujourd’hui, que Nicolas Mathieu a situé son roman « Leurs enfants après eux », prix Goncourt 2018. En Lorraine, plus précisément. Paysages sinistrés, zones désindustrialisées, hauts-fourneaux éteints. Nous sommes dans les années 90, trois étés successifs. De l’écrit à l’écran, d’un art à l’autre, les cinéastes Ludovic et Zoran Boukherma se sont emparés de cet univers un peu plombé où se débattent quelques adolescents ; premiers désirs, coups de foudre, mais aussi les drogues omniprésentes, les petits larcins et la violence qui va avec.
Nous suivons principalement Anthony, 14 ans. De sa rencontre avec Stéphanie, plutôt bourge, premier amour, à ses conflits avec d’autres jeunes, notamment immigrés. C’est toute une petite sociologie qui s’anime, comme une carte de classes. Bourgeoisie de province, aux études, une petite classe moyenne déjà aux galères, et tout en dessous, les immigrés. Tant bien que mal, tous se côtoient... Et en arrière-plan, d’autres réalités. Alcoolisme, violences familiales, jusqu’à cette scène de suicide, au ralenti, comme en mineur, à couper le souffle.
Au fil des trois étapes, les cinéastes évoquent les années 90, accompagnent les images des succès musicaux de l’époque, comme une nostalgie mélancolique et à la fin, par un bref dialogue, ouvrent un léger espoir.
Selon que l’on a lu le livre, ou pas, la vision du spectateur n’est probablement pas la même. Certains y chercheront la complexité et la densité de l’écrit, d’autres se contenteront du récit linéaire mais heurté, et émouvant par l’image, en soulignant l’interprétation magistrale et vibrante de Paul Kircher dans le rôle d’Anthony.
Tessa Parzenczewski