MR. HOLMES

Librement adapté du roman de Mitch Cullin « A
Slight Trick of the Mind », Mr. Holmes met en scène le
célèbre détective Sherlock Holmes (Ian McKellen) qui, à l’âge canonique de 93
ans, vit retiré dans son cottage du Sussex en compagnie de sa servante, Mrs.
Munro (Laura Linney) et de son fils, Roger (Milo Parker). Viel homme au caractère
parfois atrabilaire, le héros mythique créé par Sir Arthur Conan Doyle en 1887
a trouvé dans l’intellect la compensation à sa grande solitude. Selon lui, la
logique est rare alors que la mort, le deuil et le chagrin ne sont que des
« common places ».

Revenu d’un voyage au Japon où il a pu
obtenir un remède censé l’aider à resserrer les fils de sa mémoire, le
détective à la retraite s’adonne à l’apiculture, un art auquel il initie le
jeune et curieux Roger. Un tantinet nostalgique, souvent ironique voire cynique,
le vieux Holmes rit, non sans regret, du personnage fictif que l’on a fait de
lui tant dans la littérature qu’au cinéma : contrairement à la légende, il
n’a jamais porté de chapeau, et à la pipe, il préfère la cigarette.

Perturbé par la réminiscence d’une vieille affaire
erronément portée à l’écran, il tâche de raviver le feu de ses souvenirs, et
c’est encouragé par Roger qu’il entreprendra de rédiger la véritable histoire
de la mystérieuse Ann Kelmot en tâchant de s’attacher aux faits. En empruntant
à rebours les couloirs du Temps, l’écriture de cette affaire sera pour lui une
manière de subsumer le souvenir et de fixer au présent un passé en voie
d’effacement. En jouant habilement sur les strates de l’écriture et de tous ses
avatars, ce film aux multiples tiroirs parvient avec succès à tracer
progressivement les lignes de démarcation entre réalité et fiction, entre
remémoration et imagination. Oscillant entre gravité, humour et
tendresse, Mr. Holmes dispose de tous les atouts pour séduire
un large public. Bien que ce film ait été réalisé par un cinéaste américain
(Bill Condon), tous les amoureux d’un cinéma à l’accent very british succomberont
au charme classique de son irréprochable mise en scène et à la délicate
justesse de son jeu d’acteurs.

( Christie
Huysmans )