Drame politique
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Coup de coeurPOUR UN SEUL DE MES DEUX YEUX

Avi Mograbi (France-Israël 2005 - distributeur : Flagey)
100 min.
4 janvier 2006
POUR UN SEUL DE MES DEUX YEUX

Ce film peut, avant de prendre sa passionnante et singulière vitesse de croisière, dérouter voire même ennuyer . Où veut-en venir le cinéaste ?

A soutenir un credo selon lequel la culture de la mort et de la vengeance terroriste n’est pas que l’apanage de l’Islam.

Mograbi, comme un dramaturge classique, étaye sa démonstration en 3 unités de plans.

Le premier s’apparente au documentaire sous forme de reportages qui mettent l’accent sur les absurdes humiliations subies par les Palestiniens dans les territoires occupés.

Le second prend la forme de conversations vidéophoniques entre le réalisateur et un ami arabe qui, après deux mois d’enfermement forcé à Bethléem, n’envisage plus que la mort comme solution à sa condition.

Le troisième est le dynamitage insolent et audacieux de deux mythes fondateurs du patriotisme juif réactualisés par des concerts rock aux accents aussi terrifiants que ceux des scansions « Allah Akbar » lors des défilés palestiniens.

Mythes qui, décodés par Mograbi, voient en Samson un kamikaze et en Massada un antécédent-miroir de ce que font subir aujourd’hui les Israéliens aux Palestiniens.

Plusieurs cinéastes se sont récemment intéressés à la question du Proche-Orient. Chaque fois avec lucidité et courage. A la radicalité désespérée des uns (Hany Abu-Assad dans « Paradise now », Elia Suleiman dans « Chronicle of a disappearance ») correspond la volonté d’encore croire en la possibilité d’un dialogue des autres (Amos Gitai dans « Free zone », Eran Riklis dans « The syrian bride »).

Mograbi, lui, privilégie la voie de la responsabilité personnelle : celle de l’objecteur de conscience
dont l’engagement pacifiste s’inscrit en creux d’une démarche de guerre. Raison pour laquelle il a dédié son film à son fils Shaul qui a refusé de faire son service militaire.

Mais, et cela ouvre la porte à un autre débat, la survie d’un Etat est-elle possible si ses enfants se retirent d’un combat qu’ils n’ont pas initié mais dont ils portent aujourd’hui la charge ? (m.c.a)