Ameni Fdhili, Fide Fdihli, Feten Fdihli, Samar Sifi
Un village en Tunisie. Un verger. Des femmes et quelques hommes cueillent les figues. Un paysage idyllique, aux couleurs pastel, comme délavés. Unité de lieu et de temps, un huis clos à ciel ouvert, où, en une journée, à travers paroles et regards, vont émerger, par bribes, les craintes, les espoirs et les révoltes aussi, qui parcourent la société tunisienne, et plus spécifiquement ici, le milieu rural. Venue du documentaire, Erige Sehiri a su capter avec un rare bonheur, en les filmant au plus près, toute la gamme des sentiments qu’expriment ces visages de jeunes filles et de femmes déjà usées, toutes non professionnelles comme le reste de la distribution. Douceur et violence alternent. Flirts légers, amours naissantes, omniprésence des tabous dans une société très conservatrice, mais aussi aspiration irrésistible à la liberté, smartphones et internet aidant. Séquences contrastées : les jeunes filles enlèvent le voile, se maquillent avec délectation tandis que plus loin, les femmes plus âgées ne sont qu’amertume. Et la réalité sociale n’est pas oubliée : salaires de famine, la toute puissance du patron, jusqu’à ce qui ressemble au droit de cuissage…
En ces temps où la dictature se réinstalle en Tunisie, Erige Sehiri nous donne à voir, sans grands discours, mais toute en sensibilité et lucidité, un pan d’une réalité peu spectaculaire mais qui témoigne de toute la violence sociale.
Ce film a obtenu le Bayard d’or au dernier Festival du film francophone de Namur et vient de remporter le Prix RêVolution eu Festival Cinemamed.
Tessa Parzenczewski