Acteurs : Aswan Reid, Cate Blachett, Déborah Mailman, Wayne Blain
Caméra d’or en 2009 pour « Samson et Dalilah », Warwick Thornton, d’origine aborigène, revient avec « The New Boy ». Situé dans les années 1940 en Australie, un garçon orphelin aborigène de neuf ans (Aswan Reid) arrive au milieu de la nuit dans un monastère éloigné dirigé par une sœur renégate (Cate Blanchett). Le monastère accueille et éduque des enfants perdus, dans la foi catholique.
La confrontation de ce « New Boy » sans nom, mutique, qui ne connaît aucun code de l’établissement, mange avec les doigts, reste à moitié nu, chasse et se promène dans la nature, va déstabiliser tout ce petit monde qui travaille, prie le Christ et cache aux autorités ecclésiastiques la mort du prêtre, responsable de l’établissement.
Le jeune garçon maîtrise certaines pratiques « magiques », les utilise pour sauver deux jeunes garçons de la mort.
Mais l’obsession du Christ, la foi catholique, les prières quotidiennes, rituelles, vont l’entraîner peu à peu vers cette religion, nouvelle pour lui, comme un refuge où il perdra peu à peu ce qu’il possédait de son éducation aborigène et ses pouvoirs.
Le film dénonce l’acculturation du peuple aborigène. Il oppose la spiritualité d’un jeune enfant, malléable, démuni, seul, éloigné de sa terre et de ses origines, à celle du Christ, omniprésent dans ce monastère éloigné de tout.
Le jeune Aswan Reid, charismatique en diable, vole la vedette à Cate Blanchett, sobre et dépassée par les évènements.
Le réalisateur australien évoque dans ce film un souvenir de sa propre enfance. Plus jeune, il est en effet passé par un collège qui civilisait les jeunes autochtones.
Même si la deuxième partie du film sombre dans une adoration du Christ de cet enfant impressionné par cette nouvelle religion, le réalisateur montre bien que ce New Boy si spécial, porteur d’une spiritualité un peu magique, perd son identité pour se mouler dans les conventions du christianisme.
On ne peut s’empêcher de penser en voyant ce film aux « générations volées », ces victimes des enlèvements arbitraires, période qui s’étend du XXème siècle aux années 1970, où l’objectif était une politique d’assimilation à l’Australie blanche. Ces politiques libérales visaient à éradiquer la culture aborigène.
Pour une grande majorité d’entre- eux, les dégâts ont été irrémédiables : impossibilité et incapacité à trouver une place, perte de leur dialecte, de leurs racines, exclusion et marginalité.
On peut dire que la population aborigène d’Australie, dont la culture vieille de plusieurs dizaines de millénaires, est parmi les plus anciennes au monde. Actuellement les Aborigènes représentent 2,3 % de la population totale de 21 millions de personnes. Ils forment un groupe social à part cumulant une multitude de handicaps sociaux depuis plus de deux siècles : difficulté d’accession à des logements décents, scolarisation moindre, consommation élevée de substances illicites, accès difficile aux soins de santé, problème d’alphabétisation, espérance de vie réduite et problèmes judiciaires répétés (Cairn.info).
Ce témoignage puissant sur les valeurs fondamentales de la diversité et du multiculturalisme vaut à coup sûr d’être vu !
Drossia Bouras