Drame familial
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TU SERAS MON FILS

Gilles Legrand (France 2011)

Valérie Mairesse, Anne Marivin, Patrick Chesnais, Niels Arestrup, Lorant Deutsch

102 min.
31 août 2011
TU SERAS MON FILS

Tous les pères ne sont pas des héros. Tous les fils ne sont pas des enfants prodigues.

 

Certains des premiers sont des salauds. Certains des seconds sont des ingrats.

 

Dans un prestigieux vignoble du bordelais, quatre destins d’hommes - les femmmes n’étant que des silhouettes donnant cadre à leurs parcours.

 

Deux pères et deux fils. Deux façons différentes d’aimer, deux rapports à la paternité, l’un basé sur l’amour et la fierté et l’autre sur l’insatisfaction et le mépris.

Et au final, la même déception et le même sentiment de trahison comme si la relation père/fils était impossible à établir et/ou à vivre lorsqu’elle se laisse gangrener par le fantasme et l’ambition.

Relation-prison dont les murs s’appellent cruauté, jalousie, manque d’amour.

Gilles Legrand et sa scénariste Delphine De Vigan (*) à travers un double drame dans lesquels les pères trahissent les fils et les fils désavouent les pères abordent une foultitude de questions - doit-on forcément aimer ses enfants ? comment accepter de ne pas être aimé de celui à qui vous devez la vie ? que transmettre à la génération suivante : un savoir ou un patrimoine ? - dans lesquelles le spectateur finit par se perdre.

Parce ce que leur complexité est traitée sans finesse et sensibilité, qualités sacrifiées sur l’autel d’un cinéma qui à force de se vouloir dans la réplique jouissive et la réaction au premier degré en devient caricatural et lourd comme un tir d’artillerie.

Si Niels Arestrup est empesé depuis « De battre mon cœur s’est arrêté » de Jacques Audiard dans un rôle de père cynique, inquisiteur et brutal, Patrick Chesnais épate par une prestation toute de douleur retenue.

Il est en quelque sort le maillon fort de cette histoire qu’il sauve de la bassesse par le regard avec lequel il la jauge - même si le geste avec lequel il la clôt apporte au film une touche inutilement mélodramatique.

Un regard qui n’est pas celui d’un homme résigné mais d’un homme persuadé que la décence commande que l’ordre des choses ne doit pas être dérangé, que la modification des privilèges dont celui d’hériter (et ipso facto de déshériter) ne doit pas être laissée au caprice d’un homme qui préfère manipuler qu’aimer.

Ce qui manque au titre « Tu seras mon fils » c’est un mot. Un mot simple qui a donné au poème de Kipling une direction et une noblesse.

Le mot « homme ».

Car finalement n’est-ce pas là, bien au-delà de toute idée d’héritage, le but de toute relation père/fils : apprendre à reconnaître et respecter l’autre.

Pour ce qu’il est et non pour ce que l’on aurait aimé qu’il fût. (mca)

(*) qui se sont rencontrés sur le tournage de « No et moi », un délicat conte urbain mis en scène par Zabou Breitman dans lequel une jeune fille pose un regard inattendu parce qu’attentif sur les SDF. Le film a été chroniqué sur ce site par Ariane Jauniaux