Romain Duris, Mei Cirne-Masuki, Judith Chemla
La paternité a le vent en poupe dans le cinéma francophone. Après l’attendrissant La fille de son père ou l’émouvant Le roman de Jim (pour ne citer qu’eux), un autre film sur la parentalité, celle des hommes, est à découvrir dans nos salles. Il s’agit cette fois d’un film belge, Une part manquante, réalisé par Guillaume Senez.
Le réalisateur belge n’en est pas à sa première œuvre sur le sujet, lui qui l’avait déjà abordé dans son premier film Keeper et dans Nos Batailles, qui lui a valu une reconnaissance critique bien méritée. Avec Une part manquante, Senez se dirige vers Tokyo, accompagné comme dans son précédent long-métrage de Romain Duris. Il est question de rapt parental, de recherche frénétique, du brin d’espoir souvent englouti dans un océan de désespérance.
Neuf ans que Jay (Romain Duris), le protagoniste de cette histoire, déambule au volant de son taxi dans la capitale japonaise, habité par l’espoir de retrouver sa fille, Lily. Un jour comme les autres, Lily entre dans son taxi, sans le reconnaitre.
Une part manquante explore les sentiments d’un père quant au grand chamboulement des retrouvailles, qui nécessite plus d’ajustements qu’imaginés. Senez met en lumière un sujet difficile, l’enlèvement parental, qui concerne des centaines d’enfants en Belgique et des milliers et milliers d’autres dans le monde. Comme pour ses précédents longs-métrages, le cinéaste belge nous offre une œuvre sensible, qui parvient à nous faire ressentir les quelques rayons de soleil que nous accorde parfois la vie. On peut bien-sûr compter sur Romain Duris pour mener le film, entre langue française et japonaise, interprétant ce rôle de parent esseulé puis consolé.
Les portraits de pères aimants que nous offre le cinéma francophone cette année se dégustent, admirables de sensibilité et sublimant la beauté de la parentalité. Être un père n’est pas qu’un statut sur papier : pour Jay notamment, c’est son identité, qu’il a perdue et qu’il essaie de retrouver, en se donnant corps et âme. Après les retrouvailles, ce sont neuf ans d’une vie à rattraper. Il faut refaire connaissance, se faire confiance, laisser la complicité s’immiscer doucement. Retrouver réellement sa fille prend plus de temps que de l’apercevoir à l’arrière de son taxi.
Senez réussit une fois de plus à traiter ce qui s’apparente être son sujet de prédilection. Moins poignant que Nos Batailles, son nouveau film est malgré tout très touchant. Ce qui nous empêche d’être complètement bouleversé, c’est un rythme trop rapide, l’enchainement des scènes, des moments entre un père et une fille qui auraient pu être plus nombreux. On ressent de l’empathie pour Jay, pour sa situation, mais une fois qu’il retrouve Lily, on aurait aimé qu’ils se redécouvrent plus longtemps.
Est-ce une véritable critique ? Ou bien l’envie simplement de rester plus longuement avec ce père et sa fille.
Flore Mouchet