Chronique familiale
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A PAS DE LOUP

Olivier Ringer (France 2012)

Wynona Ringer, Olivier Ringer

77 min.
20 juin 2012
A PAS DE LOUP

Cathy ou le besoin de se savoir aimée.

Elle a 6 ans. Boulotte et peu rigolote, elle est habitée par le sentiment de ne pas compter pour ses parents. A la fin d’un week-end à la campagne, elle choisit de leur fausser compagnie.

S’ils se rendent compte de son absence, suppute-elle, ils viendront la rechercher. Elle aura enfin la preuve qu’elle existe pour eux.

Sinon …

C’est dans ces 3 petits points de suspension que gît le mystère de ce film - la deuxième réalisation d’Olivier Ringer après « Pom, le poulain » - à la fois intéressant et imparfait, qui interpelle par son questionnement et agace par un sentiment proche de l’usurpation.

Questionnement universel, comme dans ces contes de fées révélateurs de nos peurs et incertitudes, sur la notion d’abandon, de retrouvailles et entre ces deux pôles temporels d’un espace d’aventures, où l’on explore, où l’on teste ses capacités à s’adapter voire à affronter le Monde.

Usurpation parce que très vite le spectateur se met à soupçonner que la cohérence et la logique des réflexions (*) de l’enfant ne sont pas celles d’une gamine de 6 ans mais d’un adulte se souvenant, avec la maturité de son âge, de sensations infantiles.

C’est dans ce hiatus entre ressenti et remémoration que se niche le côté trop appliqué, trop « clé sur porte » de ce film qui a pourtant obtenu cette année le prix du meilleur film européen pour enfants.

Dans la mesure sans doute où il visite un triptyque de valeurs qui fondent la vie de ceux qui n’ont pas encore atteint l’âge de raison.

A savoir une innocence qui encombre et que l’on souhaite éprouver aux difficultés de la vie. Celles-ci étant métaphorisées par la forêt, lieu éminemment symbolique des rencontres hasardeuses et potentiellement traumatiques.

Une innocence, un besoin de parents attentifs et une furieuse envie de communiquer avec tout ce qui est à portée de mains - la nature, les animaux, toutes ces éthérées et minuscules petites choses qui deviennent invisibles pour ceux qui perdent, au fil des ans, la capacité de les voir.

« A pas de loup » est aussi un cheminement sur la pointe des pieds d’un père vers son enfant, d’un père qui prend conscience peu à peu qu’un « petit » doit être regardé, guidé. Voire apprivoisé.

S’il y a un père dans cette histoire, il y a aussi une grande absente.

La mère. Celle qui vous fait sentir, par son intérêt, que vous êtes vivante. Et importante.

Cette mère qui, comme chez Baudelaire, « … un soir charmant viendrait en complice, à pas de loup, près de vous … » (mca) .

(*) qui ne ressortent que du registre du monologue - le dialogue est absent du film. Oubli du relationnel langagier afin de cerner avec plus de justesse l’importance du fantasme chez l’enfant et sa propension à se tisser ce que Freud appelait son propre roman familial.