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Coup de coeurLARA

Jan-Ole Gerster

Corinna Harfouch, Tom Schilling, André Jung…

98 min.
23 septembre 2020
LARA

Huit ans après « Oh boy », Jan-Ole Gerster nous amène découvrir Lara (Corinna Harfouch) et à suivre ses pas lors d’une journée de sa vie.

Dès les premières images, à petites touches, on croit comprendre qu’elle ne va pas bien, seule, face à un pan de mur vide où devait se trouver un piano, que cette journée est très particulière pour elle car c’est son soixantième anniversaire et qu’elle se prépare à aller assister au premier concert en tant que compositeur de son fils chéri Viktor (Tom Schilling).
C’est la relation entre cette mère dévastatrice et ce fils qu’elle a modelé, formé à exceller comme pianiste qui va sous tendre tout le film.
Ce concert est une occasion pour Lara de retrouver un peu d’intérêt à vivre, de désirer s’acheter une belle robe, de retrouver un semblant de vie sociale, et d’humanité en offrant à qui se trouve sur son chemin des places pour le concert de son fils.

Peu à peu, scène par scène, Gerster nous dévoile les facettes de la vie de Lara qui ont pu l’amener à être ce qu’elle est devenue c’est-à-dire une femme frustrée, une mère nocive, une femme blessée inutilement blessante non seulement avec ses collègues mais avec toute personne rencontrée, une femme « étrangère » aux autres. Nous sentons que cette raideur, cette impasse existentielle, cette absence totale d’empathie avec les gens trouvent leur source dans une blessure profonde : Lara, elle-même, était une pianiste talentueuse mais son manque de confiance en elle et les critiques de son professeur ont coupé net sa carrière de pianiste.

Le film est ponctué par des scènes très fortes : le dialogue de Lara et de Viktor durant lequel elle lui fait comprendre qu’il est (encore) un piètre compositeur ; l’échange de regards entre Lara et Viktor alors qu’il joue sa composition comme un geste de revanche, la scène ou Lara quitte la salle de concert disant par là à son fils qu’il a gagné ou plutôt qu’elle a perdu.

Un film sur la solitude, oui mais sur une solitude construite, restituée magnifiquement par Ole Gerster qui nous empêche de ressentir la moindre empathie pour Lara bien que l’on pressent une immense souffrance sous cette froideur.

Le film repose sur la magistrale interprétation de Corinna Harfouch et la splendide construction et progression vers la fin qui semble présager un début de renaissance.
Une femme, une journée à Berlin : : un film dur, envoutant à voir absolument

France Soubeyran