Chronique dramatique
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DON’T COME KNOCKING

Wim Wenders (Alemagne/USA 2005 - distributeur : Cinéart)

Jessica Lange, Sam Shepard, Tim Roth

122 min.
19 octobre 2005
DON'T COME KNOCKING

Dès la première image, le spectateur est happé par deux taches d’un bleu intense qui à la fois l’éblouissent et le questionnent.

La caméra prenant du champ donne forme à ces taches et nous emmène dan la somptuosité de l’Ouest américain, là où une ex-icône du western, Howard Spence (Sam Shepard ) harassé d’être figé dans le rôle du vertueux cow-boy, a accroché à la porte de sa caravane, un écriteau explicite « Don’t come knocking », forme argotique de l’hôtelier « Don’t disturb ».

Il en a tellement marre Howard qu’il décide, sur un coup de tête, de quitter son ixième tournage et de fuir.

Fuir pour essayer de se trouver .

S’il choisit, en chemin, de se dépouiller de son identité construite d’alcoolique dépressif et abonné aux liaisons d’une nuit, il ne se doute pas de la nouvelle que sa mère va lui révéler et à partir de laquelle il va essayer, avec une touchante maladresse, de donner un autre sens à sa vie.

Comme souvent chez Wenders les histoires sont des histoires de famille, des quêtes d’amour, et des plate formes pour initier des relations plus vraies et plus affectives.

Epinglons les 3 actrices féminines, qui apportent l’une par sa sérénité (Eva Marie Saint), l’autre par son sens de l’adaptation (Jessica Lange) et la troisième (Sarah Polley) par sa tendresse, une réponse apaisante à la question de l’abandon.

A travers un genre cinématographique qui effleure bon nombre de thèmes propres au western [ les grands espaces qui rappellent Ford et Anthony Mann, la ville-fantôme, le chasseur de primes, (ici un étrange détective -Tom Roth - chargé par les assurances de ramener Howard sur le lieu de tournage), le déserteur, la belle serveuse de bar…] le film prend une dimension existentielle qui peut renvoyer chacun à se demander « qu’est-ce que je serais si je n’avais pas connu mon père ou mon fils ? ».

« Don’t come .. . » a aussi une autre dimension, plus subtilement critique vis-à-vis de la dérive d’un certain cinéma américain convenu et formaté qui contraint les acteurs à tourner « menottes aux poignets » comme Howard ramené de force sur le lieu de tournage qu’il avait pourtant fui à brides abattues.

Rares sont les cinéastes et les scénaristes qui savent nouer, dans la même histoire, une approche intimiste et une objurgation symbolique.
Le duo Wenders / Shepard y réussit, méritant ainsi notre respect et notre admiration. (m.c.a)