Reconstitution d’un moment de l’histoire
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Coup de coeurTHE QUEEN

Stephen Frears (GB 2006)

Helen Mirren, Michael Sheen, James Cromwell

110 min.
18 octobre 2006
THE QUEEN

« The Queen » a le charme d’une démonstration hégélienne lisible par tous parce que portée par une narration intelligemment incarnée par une royale Helen Mirren.

En effet ce à quoi nous convient Stephen Frears et le scénariste Peter Morgan c’est à leur représentation d’une semaine de l’Histoire, celle qui a suivi la mort accidentelle de Diana le 31 août 1997, mais c’est aussi et surtout à une démarche dialectique dont les 3 moments - thèse, antithèse et synthèse - vont habilement s’enchaîner.

La mise en place du dispositif est simple. Il oppose une reine dynastique à une princesse de coeur. Une belle-mère à une belle fille (qui, comme dans les blagues au dos des éphémérides ont du mal à se « blair » er…). Une adepte de l’« understatement » et une addict des révélations médiatiques.

En spectateur de ces façons d’être irréconciliables un peuple plongé dans une over réaction émotionnelle et épidermique qui ne comprend pas le mutisme et le quant-à-soi de la Couronne appendue à son credo du « Never explain never complain ».

En arbitre de ce face-à-face et pour éviter qu’il ne devienne un duel constitutionnel qui, selon certains, aurait pu entraîner la chute de la maison Windsor, un jeune Premier Ministre Tony Blair. Dont on ne sait pas très bien si la promptitude de réaction a pour causes son souhait d’établir son autorité vis-à-vis de la Couronne ou de soutenir une Reine qui incarne, à ses yeux, une légitimité qui, par sa discrétion, souligne le superficiel et paradoxal opportunisme de Diana.
Ce qui est certain c’est que son intervention a été initiatrice d’une façon de penser et de communiquer plus simple, plus moderne. Blair connaissait-il la théorie de Georg Simmel sur les effets socialisateurs d’un conflit lorsque celui-ci trouve à se résoudre ?

Stephen Frears aborde son sujet avec les deux outils qu’on lui connaît : d’abord l’intérêt manifeste pour la part sensible cachée en chacun (« Prick up your ears ») et ensuite le courage tranquille avec lequel il dérange le prêt-à-penser d’une opinion fût-elle la sienne. Lui, républicain avéré, soutient l’alliance d’un homme de gauche à un système de droite pour permettre à celui-ci de renouer avec son peuple un lien de confiance.

Si l’impartialité de Frears est, vis-à-vis de la « Queen », teintée d’une sympathique indulgence, il n’en est pas de même de son entourage et notamment de son époux présenté comme un insupportable égoïste. Ce qui est peut-être injuste mais finalement bien consensuel en regard du traitement acide que lui aurait réservé cet autre anglais, lui aussi intéressé par les « Royals » de son pays : Shakespeare.

Helen Mirren, récompensée pour sa prestation exemplaire au dernier festival de Venise par la coupe Volpi de la meilleure actrice, mérite de figurer dans ce virtuel « Westminster Cathedral » cinématographique dans lequel l’ont précédée, avec le même talent, Vanessa Redgrave « Mary, Queen of Scots », Glenda Jackson « Elisabeth, R » et elle-même en tant que Charlotte l’épouse du Roi Georges III de Nicholas Hytner. (m.c.a)

site officiel du film : www.thequeenmovie.co.uk