Drame familial
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Coup de coeurIRINA PALM

Sam Garbarski (Belgique/UK/France/Allemagne 2007 - distributeur : Paradiso)

Marianne Faithfull, Miki Manojlovic

105 min.
18 avril 2007
IRINA PALM

On dit d’un bon pianiste, qu’il a le toucher délicat.
On dit d’une bonne bran…, qu’elle a le toucher doux.
Dans les deux cas, avoir le bon coup de main articulé à une souplesse vaillante du poignet aide au succès de l’entreprise.

C’est ce que va comprendre, à son âme défendante, l’héroïne de ce joli film qui mélange moments de tendresse et d’humour avec ce ton très british de la mise à respectueuse distance d’un sujet que peu de chose aurait pu alourdir de vulgarité.

A l’âge où tant de quinquagénaires se préparent à profiter de l’oisiveté de la retraite, Maggie, veuve et grand-mère, devient une des reines du Sexy Soho sous le pseudonyme chantant et évocateur d’Irina Palm.

Le film [scénarisé par Philippe Blasband (*)] est construit comme un livre. Il se compose de séquences ou chapitres courts, bien agencés qu’un insert noir - qui correspond au temps très court du passage d’une page à une autre – à la fois sépare et unit. Comme la maladie orpheline du petit Ollie qui cloisonne ses parents et grand-mère dans un chagrin solitaire avant de les réunir dans un élan de solidarité curative.

Il y a dans « Irina Palm » un sentiment qui imprègne la réalisation d’un optimisme et d’une vitalité qui met de bonne humeur. Celui d’une générosité qui permet de transcender les difficultés de la vie, qu’elles soient relationnelles ou événementielles.

Comme dans son long métrage précédent « Le tango des Rashevski », Sam Garbarski accorde à la famille et au sein de celle-ci à la grand-mère un rôle moteur, empreint de confiance et de détermination.

Marianne Faithfull est formidable. Elle garde dans sa voix de comédienne ce quelque chose de "Broken English" qui enrobe ses chansons de souterraine sensualité. Elle ne donne jamais l’impression d’être dans la performance mais de simplement puiser dans ses richesses personnelles de sensibilité et d’acquis de vie de quoi nourrir son personnage. Elle est efficacement secondée par Miki Manojlovic, dont le côté burlesque si souvent mis en exergue par Emir Kusturica (« Underground », « Black cat, white cat ») est mis sous le boisseau au profit d’une inattendue délicatesse.

Les autres acteurs, en majorité sortis de l’inépuisable vivier que constitue le théâtre anglais, sont justes et attachants. Ils sont l’indispensable frise qui donne consistance et crédibilité à cette bourgeoisie moyenne qui comme chez Stephen Frears ou Mike Leigh, constitue le terreau social d’un film bien ancré dans son temps et dans son espace géographique ( le Hot London et sa terne périphérie ouest).

Est-ce parce qu’elle incarne à elle seule les versants à la fois romantique, dramatique et mélancolique d’une existence, que Marianne Faithfull réussit à insuffler à Irina ce quelque chose d’excentriquement séduisant malgré la silhouette alourdie, la démarche disgracieuse et la vêture de « la rombière mal attifée » ?

Elle a été dans les années mil neuf cent soixante « Sister Morphine » pour les Rolling Stones, Ophélie dans l’ « Hamlet » de Tony Richardson. Dans les années mil neuf cent quatre-vingt, sa "Ballad of Lucy Jordan" accompagnait le road movie « Thelma et Louise » de Ridley Scott. Il y a un an elle était, pour Sofia Coppola, Marie-Thérèse d’Autriche, la mère de Marie-Antoinette. Elle est aujourd’hui une « granny » de caractère. Et demain elle reprendra quelques-unes de ses grandes chansons dans un nouveau spectacle dont le titre aurait pu convenir au film de Garbarski : « Songs of Innocence and Experience ».

Ceux qui ont aimé la belle musique du film, composée par le groupe belge Ghinzu, peuvent en retrouver des extraits sur le site officiel du film : www.irinapalm-themovie.com (m.c.a)

(*) dont la plume a permis notamment "Une liaison pornographique" de Frédéric Fonteyne et "Thomas est amoureux" de Pierre-Paul Renders